110 - L’isolation est un aspect clef du développement artistique - Francesco Carovillano

 
 

Lundi 28 avril, 10h. J’arrive sur le parking du rendez vous, au coeur de la forêt de Fontainebleau. Des retraités s’échauffent pour leur randonnée, bâtons de marche en main, et s’éloignent alors que je descends de ma voiture, me laissant seul avec un silence dont je n’ai plus l’habitude depuis longtemps, moi qui suis suis habitué à un fond sonore permanent typique de la vie dans une grande ville.

Francesco est déjà là et me repère instantanément. Il est en tenue de randonneur, je suis en pantalon basket, le plus proche de ce que j’aurais pu imaginer devoir porter en ayant cette idée d’enregistrer cet épisode au coeur de son sujet, en pleine forêt.

Il me fait visiter, me montre ses spots préférés, fait une photo en passant, connait la forêt comme je connais les rues en bas de chez moi, et nous escaladons un rocher pour nous retrouver devant une vue digne d’un tableau, où nous surplombons la forêt. C’est là que nous enregistrerons notre épisode, assis à même le sol, avec une vue à couper le souffle, et le vent qui menace de faire tomber mon enregistreur de plusieurs mètres à tout moment.

D’habitude, je vous fais un résumé de ce que nous allons dire, mais cette fois, je pense que le récit de la rencontre vous donnera une bonne idée du personnage que je vais interviewer. Cette année, j’ai décidé que le podcast allait, comme la photo, me faire voir le monde en plus de me faire rencontrer du monde, et j’ai sauté sur l’occasion de découvrir un lieu mystérieux à mes yeux, et aussi de parler du rapport entre photographie et peinture, qui m’intéresse beaucoup en ce moment. Le mail de Francesco est arrivé pile à ce moment là. En Anglais, ça s’appelle “Serendipity”, l’univers qui répond à nos demandes.

Bienvenue avec nous dans la forêt de Fontainebleau. Bienvenue dans l'oeil de Francesco Carovillano.


A propos de l’invité:

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Legos de l’épisode:

  • Je passe pratiquement tout mon temps à créer des projets personnels à travers cette forêt.

  • S’il n’y a pas de réponse, la réponse est non, et il faut continuer à travailler.

  • Pour moi, déménager en France, c’était excellent, parce que je ne connaissais pas la langue, personne ne me connaissait, donc personne ne pouvait m’inviter le soir chez eux, j’étais complètement isolé dans ma petite bulle et mon désir de devenir photographe de paysage, et ça m’a amené à travailler comme un fou pendant 2-3 ans, avant de commencer à attirer l’intérêt de clients plutôt importants dans le domaine du tourisme.

  • La plupart des agences de stock ne sont pas spécialisées… je me suis dit “ca va pas, parce qu’ils prennent n’importe quel type de photo”.

  • Petit à petit, j’ai étudié les photos des autres photographes que cette agence représente… A force de me poser plein de questions, j’ai changé petit à petit ma compréhension de ce qu’est une photo de voyage, et de ce que ça n’est pas.

  • J’ai senti un énorme besoin de transformer le voyage extérieur en voyage intérieur. Et donc j’ai commencé à passer mes journées à Fontainebleau, dans la forêt, à la découvrir, et en même temps j’ai ressenti un énorme besoin d’étudier l’histoire de l’art, mais surtout personnalité et le choix de vie que les peintres ont fait. Qu’est ce qui les a amenés à faire cette vie de véritable artiste, où on ne travaille pas vraiment pour l’argent, mais pour exprimer ce que nous on veut exprimer?

  • (Sur Cezanne et Pissarro - NDLR) Le génie, ou le talent, ça n’existe pas vraiment, c’était des gens qui avaient une énorme envie de travailler, de continuer.

  • C’est une quête vers la découverte de soi-même, à travers l’art, et c’est cet esprit que j’essaie de traduire dans mes journées à Fontainebleau, sans me dire “il faut absolument arriver tout de suite à créer quelque chose de beau”. Non, c’est vraiment une quête, et la quête démarre dans une introspection.

  • Etre créatif, c’est accueillir les fois où on se trompe, et essayer de mettre cette nouvelle compréhension de nous-même, des choses qu’on a raté, vers les prochaines créations… C’est aussi comment on organise notre vie autour de ce qui est important pour nous.

  • Je pourrais rester des heures et des heures à me poser plein de questions sur comment mieux interpréter cette scène par rapport à ce que je ressens quand je suis devant elle.

  • Une belle image, c’est une image qui crée un monde à elle-même, on ne peut pas imaginer qu’hors du cadrage, il y a quelque chose.

  • Le premier souci, c’est comment je peux faire ça (la photo), que j’adore, toute la journée et tout mon temps, c’est ‘résoudre le souci économique. Une fois que le souci économique est géré et qu’on a une certaine tranquillité… on peut aller au delà.

  • Le succès commercial, oui c’est bien, mais il y a beaucoup plus au delà, qu’au début on ne peut pas voir parce qu’on a ce souci de “Comment je peux arriver à faire ça tout le temps?”.

  • Ca m’a pris du temps d’accepter tout ça, je me suis rendu compte que j’avais une personnalité artistique et que je ne pourrais pas vivre autrement.

  • J”ai passé des années à étudier les photos des autres qui ont marché, et à intégrer tout ça, mais en ajoutant ma sensibilité.

  • J’essaie d’avancer ce qui a été fait jusqu’à maintenant.

  • Dans la partie commerciale, on ne peut pas vraiment avancer l’art de la photographie, on en peut pas avancer de nouvelles idées esthétiques, parce qu’on sera toujours restreint dans des contraintes commerciales.

  • Ce que je cherche c’est une harmonie, une simplicité, et un bon équilibre du cadrage.

  • Je ne cherche pas à voir ces lieux dans l’histoire de ma vie, moi j’essaie de rentrer dans leur histoire.

  • Chaque fois que je retourne sur ces lieux, c’est une découverte. Ca ne s’arrêtera jamais, parce que la forêt change tout le temps… c’est aussi parce que ma sensibilité change, la foret aide à façonner ma sensibilité à voir autre chose.

  • Picasso disait, je ne cherche pas, je ne fais que trouver, comme si les visions arrivaient à lui.

  • L’isolation est un aspect clef du développement artistique. C’est un énorme privilège de ne pas avoir de règles et de simplement essayer de m’écouter.

  • Dans l’animation, on est constamment critiqué, et donc tout de suite, il faut faire une différence: la critique n’est pas sur toi, elle est sur ton travail. Une fois que c’est compris, on veut les critiques, on en a besoin, on les cherche constamment, parce qu’on sait que ce n’est pas sur nous, mais sur ce qu’on a créé.

  • Ma découverte de Fontainebleau, ça veut aussi dire une nouvelle découverte de moi-même, à travers la forêt.

  • Si on ne se trompe pas, on n’arrive pas à creuser en nous-même pour comprendre “qu’est-ce que je veux faire demain matin?”.

Dans cet épisode, on parle de:


A propos du Podcast:

Hôte: Julien Pasternak - Instagram - LinkedIn - Clubhouse

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Générique d'intro: Joakim Karud (https://soundcloud.com/joakimkarud) 

Générique de fin: Dyalla Swain (http://soundcloud.com/dyallas)

 
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