083 - Moi, je photographie l'ordinaire - Thierry Maignan (@lepetitgarsnoir)
Souvent la photographie sur Instagram, c’est une façon de se faire connaitre et de se montrer. Mon invité c’est tout l’inverse: le photographie, c’est sa bouffée d’oxygène, son ouverture au monde, c’est humain, sans limite, affranchi des exigences et des attentes du reste du monde.
Ca ne l’empêche pas de cartonner sur Instagram, et je suis même convaincu que ça l’aide à bien tourner.
Dans cet épisode, on va faire un parallèle avec d’autres artistes, voir que la street photography, ça peut aussi se conter en musique, et se rendre compte que l’art pour soi, c’est toujours mieux que l’art pour les autres.
Bienvenue dans l'oeil de Thierry Maignan.
A propos de l’invité: Thierry Maignan
A propos du Podcast:
Hôte: Julien Pasternak - Instagram - LinkedIn - Clubhouse
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Générique d'intro: Joakim Karud (https://soundcloud.com/joakimkarud)
Générique de fin: Dyalla Swain (http://soundcloud.com/dyallas)
Transcription automatisée) de l’épisode:
Souvent la photo sur Instagram c'est une façon de se faire connaître et de se montrer.
Mon invité c'est tout l'inverse.
La photographie c'est sa bouffée d'oxygène, son ouverture au monde.
C'est humain, sans limite, affranchi des exigences et des attentes du reste du monde.
Ça ne l'empêche pas de cartonner sur Instagram et je suis même convaincu que ça l'aide à bien tourner.
Dans cet épisode, on va faire un parallèle avec d'autres artistes, voir que la street ça peut aussi se compter en musique, et se rendre compte que l'art pour soi c'est toujours mieux que l'art pour les autres.
Et si cet épisode vous plaît et vous apporte quelque chose, n'oubliez pas de laisser un commentaire sur votre plateforme de podcast préférée ou de le partager sur les réseaux sociaux.
Bonne écoute !
Vous êtes tout les gens là du photographe !
Bienvenue dans ce podcast par un photographe, sur un photographe, pour les photographes.
Je suis Damien Pasternak et aujourd'hui, je vous emmène dans l'île de Thierry Mégnan.
Bonjour, bienvenue, enchanté de te rencontrer enfin.
Merci.
Ça fait un petit moment que je te suis sur Instagram, je crois qu'on se suit de façon croisée sur Instagram.
Ça doit remonter soit à l'épisode de Vuteara, qui doit être un des premiers que toi tu as entendu et que du coup tu m'as suivi et du coup moi je t'ai suivi.
Je trouvais ton travail intéressant, peut-être Valentine, mais on a quelques relations en street en commun, c'est assez rigolo.
Donc bienvenue, merci d'avoir accepté l'invitation.
C'est moi qui te remercie.
Ça me fait plaisir d'avoir quelqu'un en face de moi, je l'ai dit la semaine dernière, quand j'avais enregistré avec Amélie, mais j'ai un peu perdu cette habitude d'avoir des gens en face de moi et de discuter en personne.
C'est vrai que l'air de rien, l'échange est vachement plus sympa.
On peut papoter avant, on peut papoter après, on peut faire des photos.
On va certainement tous les deux, après l'enregistrement, faire un truc.
Ça fait longtemps que je me dis qu'il faut que je fasse plus de portraits, il faut que je fasse plus de portraits de tout le monde et que j'ai peu d'opportunités.
En fait, je me rends compte que je fais des portraits audios des gens, je ne fais pas leur portrait alors que je les vois et que c'est complètement idiot de ma part de ne pas en profiter.
Donc du coup, on va certainement faire un petit portrait.
Ça illustrera le podcast, possiblement, sauf si je me suis complètement raté ou qu'on finit trop tard parce que derrière j'ai plein de choses à faire.
Mais ce sera probablement le mien.
Ce qui sera rigolo.
Tu connais la première question du podcast, c'est l'évêtor pitch.
Tu es dans l'ascenseur, tu as trois étages pour te présenter à Steve Jobs.
Qu'est-ce que tu lui dis ?
Alors, ce que je vais lui dire, c'est que je m'appelle Thierry Mégnan, connu sous le nom du petit gamard sur les réseaux sociaux.
Je fais de la photographie, spécifiquement de la photographie de rue.
Donc voilà, mon travail est basé sur l'humain, sur la population, sur les gens.
J'adore le noir et blanc.
Et donc voilà, c'est un peu la photographie, c'est un peu mon ouverture au monde, on va dire.
D'accord, tu dis j'adore le noir et blanc et sur Instagram, ta légende, c'est j'adore la couleur.
En fait, j'aime bien les deux.
J'aime bien les deux, mais la réalité, c'est qu'il y en a qui disent que le noir est une couleur.
Il y en a qui disent que c'est une nuance.
J'aime bien dire que c'est une nuance parce que l'être humain est nuancé.
Le noir est un mélange de toutes les couleurs, en fait.
Voilà, c'est ça.
Et nous, on est nuancé, on n'est pas noir ou blanc, on est honnête.
On est tous gris.
J'ai vu, tu le mets beaucoup en avant et j'aime bien, parce que j'aime bien le matériel, malgré tout.
Je n'ai pas oublié de dire que la plus importante, c'est l'œil, machin, truc et tout.
Quand tu as un Leica dans la main, tu as unLeica dans la main.
Tu as acheté un Leica un jour, j'ai l'impression que ça a été, alors ce n'était pas ton point de départ, mais ça a été la petite marche qui t'a fait passer un cap.
Avant, j'étais au Numérique.
J'avais un Ricoh GR2, je ne sais pas si tu connais.
Je suis un grand fan de Dado Moriyama, par exemple.
J'étais un peu dans le mimétisme au début.
J'ai fait 3-4 ans de Numérique en street, un peu avec la même démarche que lui.
Je pense qu'aujourd'hui encore, j'ai la même démarche que lui.
Un peu frénésique, tu avances tout droit et tu ne te retournes pas.
J'ai un ami qui s'appelle Ousmane, qui était à l'Argentique depuis un moment.
Il me dit « Non Thierry, il faut que tu fasses l'Argentique ».
Pour moi, c'était trop dur de ne pas voir ce que tu fais.
Je me dis que je vais me louper, ce n'est pas possible.
En fait, c'est exactement la même chose.
J'ai acheté l'appareil, j'ai mis toutes mes économies dedans, en tout cas une bonne partie, et depuis je ne l'ai plus lâché.
Je suis quelqu'un qui est attaché à l'objet.
À partir du moment où j'ai un appareil, je ne le lâche pas.
Je ne suis pas quelqu'un qui n'est pas changé.
J'ai l'impression que c'est plus mon ami.
Je l'ai toujours avec, je le connais par cœur.
Je sais ses défauts, je sais ses qualités, et c'est ce qui est important.
C'est une bonne philosophie.
C'est vrai que ce que je dis souvent, changer d'appareil toutes les 5 minutes, c'est le meilleur moyen de ne pas savoir s'en servir quand ça devient chaud.
Je raconte de temps en temps cette histoire, mais il y a 3-4 ans, je fais un job en connecté à l'ordinateur un soir, et le lendemain j'ai une barmite va, et j'arrive dans la synagogue, je sors mes appareils, je vais faire la première photo du lieu, il me reste 15 minutes avant que la famille arrive, et mon appareil refuse de fonctionner.
Et là, si tu ne connais pas ton appareil, tu n'as pas la moindre idée de où aller farfouiller dans les menus pour essayer de régler le problème.
Alors effectivement, je l'avais mis en mode USB, et je n'avais pas fait sauter le truc, mais quand tu ne sais pas où c'est, l'air de rien, et que tu as 10 minutes et que tu es en panique, ça devient vite compliqué.
Connaître son appareil, et lui rester fidèle, ou au moins rester fidèle à la même gamme, pour toujours avoir les mêmes réflexes, je ne peux que te donner raison.
À ta présentation, je rajouterais une chose, c'est parisien.
C'est vrai.
Parisien, moi je suis de la banlieue parisienne, de 77, et donc en fait, moi, depuis gamin, je montais à Paris, je suis à une demi-heure de Paris, je vais à un banlieue qui vient à Paris, et en fait, directement, je suis sur Paris-Est.
Et donc, peut-être pour ça aussi, que toutes mes photos sont sur cette zone-là.
Donc oui, les parisiens, ça m'a toujours fasciné, en fait, Paris, un petit gars de la banlieue, j'ai toujours aimé Paris, je ne sais pas, c'est une grande ville, au même titre que New York, au même titre que Tokyo, ce sont des villes qui me fascinent, en fait.
Oui, c'est des villes qui ont été très photographiées aussi, peut-être que ça fait partie de ton imaginaire aussi ?
Exactement, oui, oui, mais on va dire Paris, aujourd'hui, je ne vais pas dire qu'elle n'est pas assez photographiée, aujourd'hui, on voit beaucoup sur les réseaux, surtout New York, surtout, mais Paris, on ne voit pas assez, à mon goût, parce qu'elle est difficile à photographier, c'est pas facile, moi j'ai des amis new-yorkais qui sont venus, grâce à Instagram, on arrive à se faire des correspondants qui viennent à Paris, qui ont des difficultés à photographier sur Paris, c'est vraiment compliqué.
Je ne sais pas si c'est Paris qui est difficile ou New York qui est plus facile, en fait.
Oui, oui, c'est une bonne question.
Parce que les grattes-ciel, les reflets, la lumière qui vient dans tous les sens, ça facilite forcément un peu les choses aussi, malgré tout, les rues qui sont bien droites, qui sont toujours dans le bon alignement, C'est vrai que c'est très photogénique, après il y a aussi l'humain, le français est très hostile à la photographie de rue, très, très, parfois c'est compliqué.
Donc, après moi, j'ai développé, comme un animal dans la jungle, qui s'adapte à son milieu, j'ai développé une certaine facilité, un certain mouvement, à faire de la photographie, tu ne me verras jamais mettre l'appareil à l'œil, par exemple, je me protège.
Donc il y a plein de choses comme ça qui font qu'on s'adapte.
C'est plus l'instinct de survie ou l'instinct du prédateur ?
C'est les deux.
Parce qu'il y a deux manières de faire, il y a la chasse et il y a la pêche.
Non, c'est un peu les deux.
Toi, tu es plutôt chasseur que pêcheur en photo.
Oui, je suis chasseur, je marche beaucoup.
Pour ceux qui se demandent ce que c'est chasseur et pêcheur en street photographie, le chasseur, il avance, et quand il voit quelque chose, il fonce, il va shooter, et le pêcheur, il va se poser dans un coin, il va faire un beau cadre, il va attendre qu'il se passe quelque chose dedans.
Mardi, je suis sorti et je marchais 15 kilomètres.
C'est bien, ça fait de l'exercice en même temps.
Oui, c'est ça.
Tu n'as pas une Apple Watch, ça remplit les anneaux.
Je me suis rendu compte, j'ai fait un mois, j'ai rempli tous mes anneaux, et en fait, je suis sorti tous les jours faire des photos, et je crois que la différence, elle est là en fait.
On va passer à la partie interview proprement dite.
On commence toujours par les trois mêmes premières questions.
La première, c'est quel livre tu offrirais à un photographe et pourquoi ?
Un livre ?
Je faudrais...
Le mien, on va dire.
Tu l'as offert à un photographe aujourd'hui.
C'est vrai.
Non, je ferais celui de Meyerowitz.
J'ai oublié le titre.
C'est le livre où il explique.
Il est derrière nous, au cœur de la photographie.
C'est ça, avec un homme avec un chapeau.
Oui, c'est ça.
Les tranches noires, il y a plusieurs livres.
Il y a un interview où il explique un peu sa philosophie, et c'est très important, je pense, pour un photographe, pour un photographe qui veut se lancer, ou pour quelqu'un qui veut comprendre la photographie, de rue en tout cas, elle est très importante.
Il est extraordinaire ce livre.
Je l'ai lu, je l'ai dévoré.
Moi, en une journée, je l'ai fini, même pas.
Est-ce que tu connais celui d'Aïdo Moriyama ?
Lequel ?
How I Take Photographs.
Il a fait un livre un peu dans le même esprit.
Non, celui-là, je ne le connais pas.
Celui-là, il est vraiment...
Je te le montrerai tout à l'heure, parce que toi qui me parles d'Aïdo Moriyama, justement, c'est un peu la même approche de livre, en fait.
Et c'était assez fascinant.
Ce qui est génial avec ces bouquins, c'est qu'ils se lisent très vite.
C'est assez impressionnant.
Par contre, il ne faut pas les poser une fois qu'on les a lus.
Il faut les reprendre, il faut les relire, il faut les surligner.
Il faut vraiment les dégueulasser, ces bouquins.
C'est ce que j'ai fait, je pense que j'ai dû le lire deux ou trois fois, je crois.
Moi, j'écris dessus des fois.
Je ne le faisais pas avant, mais maintenant, tous les bouquins que je lis comme ça, je surligne, j'y vais franchement.
Parce qu'en vrai, c'est dommage, tu as accès à un savoir extraordinaire pour une quinzaine d'euros.
C'est une masterclass à 15 euros.
Je ne sais plus avec qui je parlais des formations.
Ils me disaient, j'ai fait ça, j'ai fait ça, j'ai fait ça.
En fait, je m'en suis rendu compte, j'en ai fait une il n'y a pas longtemps.
Et là, je suis juste en train de la retranscrire et je me rends compte que j'ai retenu peut-être 5% de tout ce que j'ai appris dedans.
Et qu'en fait, juste la relire, c'est mieux que d'aller en faire une nouvelle.
C'est vrai, c'est vrai.
Surtout que celle-là, elle est déjà payée, donc c'est pas mal.
Très bonne réponse.
Si je te demande, c'est quoi être créatif ?
Être créatif, c'est être ouvert.
C'est d'être ouvert et d'accepter le changement, le changement des autres et aussi de soi-même.
Franchement, c'est ça d'être créatif.
Par exemple, si je prends mon exemple, j'ai toujours été créatif au détriment de l'école, je crois.
Et donc, j'ai toujours dessiné.
Et un jour, Baska, par exemple, parce que tu avais vu Baska son nom dans le truc, il m'a donné un peu une claque, on va dire.
J'ai vu sa peinture, ça m'a dit « Wow, c'est qui ce gars qui arrive, qui fait ce genre de peinture et tout ?
» Et en plus, il est d'origine haïtienne, un peu comme moi.
Donc forcément, on cherche toujours des modèles quand on est jeune.
Alors lui, il est noir, américano-haïtien, je suis franco-haïtien et Guyana aussi un petit peu.
Et donc forcément, ça nous parle.
Et donc, toujours dans ce truc-là, je me suis dit « Ah, c'est cool ».
J'étais un peu dans le mimétisme au début.
C'est une bonne manière d'apprendre.
En fait, tu le dis comme si c'était un défaut.
Mais en fait, être dans le mimétisme de quelqu'un à qui on aimerait bien ressembler, je pense que c'est la meilleure...
Bien sûr, bien sûr.
Et si je fais de la photographie aujourd'hui, ce qui est bizarre, c'est que c'est un peu grâce à lui.
Alors que ça n'a rien à voir.
Ça n'a rien à voir.
Donc voilà, la créativité, c'est ça.
C'est accepter de créer.
Parce que des fois, on se met des barrières.
Des fois, on se met des barrières, on se dit « Non, je ne peux pas.
Lui, il a fait ça, je ne peux pas.
C'est impossible, c'est compliqué.
» Il ne faut pas se les mettre.
Il faut avoir confiance en soi.
Ce que je trouve merveilleux, j'en parlais de Vuteara tout à l'heure.
Il a photographié, je ne sais pas si tu as vu, cette espèce de mannequin géant sur le magasin Louis Vuitton, sur les Champs-Élysées.
Un peu magnétique, là.
Oui.
Et lui a été le photographe.
Donc je l'ai vu, je n'étais pas au courant que ce truc-là existait.
J'ai été voir, j'ai vu passer ça dans le feed de Vuteara.
Et j'ai dit « Super, je vais aller voir.
» Et j'ai été.
Et j'ai commencé à faire des photos.
Puis je me suis dit « Je ne vais pas faire ça.
Je ne vais pas faire un reflet.
Je ne vais pas faire ce truc, je ne vais pas faire machin.
» Et dans ma tête, tout ce que Vuteara avait fait, c'était génial.
Et tout ce que moi, j'avais fait, c'était de la dope.
Sauf que je n'avais pas vraiment regardé son truc.
Donc j'y retourne.
Et en fait, tout ce que je n'ai pas voulu, je ne me suis pas autorisé à faire en me disant « C'est trop bateau.
» C'est ce que je trouvais beau chez lui.
Donc tu vois, il a fait un reflet.
Vuteara, pour le coup, il a cette facilité qui peut paraître kitsch sur les bords.
Mais lui, quand il le fait, ce n'est pas du tout kitsch.
C'est super beau, c'est super carré.
Et c'est pour ça que j'admire son travail.
Parce que je pense que moi, si je le fais, personnellement, je ne pense pas que je vais aimer moi.
Mais moi, quand je le vois, je vois son travail, je kiffe.
Mais c'est rigolo comme tu ne t'autorises pas à faire des trucs que tu admires chez les autres, parce que tu as l'impression que tu vas faire un truc ultra bateau.
Oui, c'est clair.
C'est quand même assez rigolo.
C'est clair.
C'est ce qui définit l'artiste en lui-même.
Vuteara, je respecte son travail.
Il est très très fort.
C'est peut-être son créneau à lui, et ce n'est peut-être pas le mien.
Oui, après, chacun son style.
J'ai bien aimé dans ce que tu as dit, être capable d'accepter son propre changement et celui des autres.
Je crois que son propre changement, c'est peut-être le plus difficile à accepter.
C'est le plus difficile, bien sûr.
C'est d'accepter, c'est de s'écouter.
C'est le plus difficile.
Moi, j'ai la chance de travailler un peu, j'étais aide-soignant pendant longtemps en santé mentale, en psychiatrie.
Et tout ça, tout ce fonctionnement dans la tête, j'essaye de me comprendre.
Sinon, c'est compliqué.
C'est une chance, en fait.
Oui, bien sûr.
C'est une chance de ouf.
OK.
Qu'est-ce qui te fait déclencher ?
Ce qui me fait déclencher, c'est l'humain.
C'est l'humain.
Je n'ai pas de choses particulières.
Je vois une tête, je vois un mouvement.
C'est un peu à l'instinct.
Je n'ai pas de choses en particulier.
Je joue souvent des jeux normaux.
Ce que j'avais dit un jour, je ne comprends pas.
La photographie, ce n'est pas photographier que l'extraordinaire.
Moi, je photographie l'ordinaire.
L'ordinaire, ce que je vois dans la rue.
Je pense que c'est ce qui est important.
Des fois, on essaie trop de chercher le sensationnel, tout le temps, sans arrêt.
Le petit truc qui fait que...
Alors que des fois, dans la simplicité, il y a des choses extraordinaires.
D'accord.
C'est souvent le plus difficile.
Oui, c'est le plus difficile.
Mais c'est à l'instinct.
Après, je le dis toujours, un photographe de rue, c'est un peu comme un sportif.
Il faut toujours pratiquer, faire ses gammes.
Tout le temps.
Quand tu ne le fais plus, quand ça fait six mois, quatre mois, cinq mois, tu perds.
Tu perds de vista, tu perds la vista.
Tu perds le ressenti.
Tu ne ressens plus la rue.
Il faut toujours y aller, parce que la rue, elle change tout le temps.
Elle change tout le temps, et une rapidité extraordinaire.
Tous les photographes, on a cette discussion souvent avec les collègues qui font du mariage.
Quand tu as fini ta saison il y a quatre, cinq mois, et que tu reprends le premier mariage derrière...
C'est difficile.
Le premier, tu as perdu.
Alors que ça ne fait pas longtemps, et que tu en as fait quelques-uns quand même.
Mais en fait, le premier...
C'est difficile.
C'est tendu, le premier mariage, où tu te rends compte...
J'ai fait un truc, c'était il y a des années, je n'avais pas encore des milliards à la ceinture, mais j'en ai eu un qui venait après une longue période où je n'en avais pas eu.
Et au moment de la sortie, j'avais rangé mes appareils, au moment de la sortie de l'église.
En me disant, on va enchaîner, et tout d'un coup, j'arrive devant, je vois tout le monde aligné, je me dis, mais quel con !
Je ressors tout en urgence.
Comment tu peux te dire ça ?
J'avais tellement perdu le réflexe de ça, que j'étais prêt à partir sans avoir fait la sortie de l'église.
C'est quand même surréaliste.
Ceux qui font du mariage, ils doivent se dire, mais ce n'est pas possible, tu es con ou quoi ?
Mais en vrai, ça devait être mon septième ou huitième mariage.
Et à l'époque, j'en faisais peut-être un tous les trois, quatre mois.
Et à un moment, tu es déconnecté du truc.
C'est vrai.
Pour le coup, aussi pour mon expérience, je suis sorti le mardi, parce que j'ai eu les examens, j'ai repris l'école.
La photographie s'est un peu passée au second plan, malheureusement.
Et donc, ça faisait peut-être six mois que je n'avais rien fait, mais vraiment rien fait.
Et donc, je suis ressorti le mardi.
C'était compliqué.
Tu as peur de t'approcher des gens.
Oui, c'est compliqué.
On a l'impression que tout le monde me regarde.
Donc, c'était un peu compliqué.
J'ai réussi à faire ce que j'avais à faire.
Je ne suis pas très satisfait du rendu, ce qui est exigeant dans ma photographie.
Mais voilà, en tout cas, c'était une bonne chose que je sois sorti, parce que ça annonce bien pour l'année.
Ça relance, et puis, il faudra qu'on discute de faire des sorties ensemble aussi.
On va bien se marrer.
Ce que je te propose, c'est qu'avant d'attaquer l'interview à proprement parler, on définisse déjà ce que c'est la photo pour toi.
Puisque tu n'es pas professionnel, qu'est-ce que ça représente pour toi la photo ?
Est-ce que c'est un hobby, un rêve, un métier potentiel ?
La photographie, avant tout, c'est un échappatoire.
Quand je le fais, je ne me donne pas de limites.
Je n'ai pas d'exigence dans une société où il y a des limites et des exigences.
Je parle de l'art en général, mais en tout cas, la photographie, c'est le médium.
Donc, si je n'ai pas envie d'en faire, je n'en fais pas.
C'est une grande richesse, c'est une grande chance de ne pas l'avoir.
Ça veut dire que si demain je suis professionnel par rapport à ça, je ne vais pas dire non, je vais gagner de l'argent.
Mais il faudrait que je trouve autre chose pour m'échapper.
D'accord.
Tu ne pourrais plus faire de la photo pour te détendre si ça devenait un métier.
C'est ça.
C'est ça.
Ça dépend.
Si je suis payé pour faire la photo de rue, pourquoi pas.
Mais il y a toujours des exigences, toujours à un moment donné.
Donc, c'est un échappatoire avant tout.
Et puis, c'est plus ça.
Comme je t'ai dit, je travaille à l'hôpital.
On en a parlé un petit peu avant.
Oui, c'est vrai que c'est un peu compliqué quand même.
Et moi, je travaille en santé mentale et en psychiatrie.
Donc, forcément, c'est compliqué.
Des fois, tu as les cris, etc.
Et faire de la photographie, comme je travaille en demi-journée.
Et donc, l'après-midi, j'allais sur Paris faire de la photographie.
Et ça me faisait du bien.
Et c'est comme ça que j'en ai fait.
J'en ai fait.
J'en ai fait.
Tu viens de le dire.
La question suivante, c'est tu fais quoi dans la vie ?
Tu viens de le dire.
Tu veux que je te le dise ?
Tu as une vraie démarche artistique par rapport à ça.
C'est ce que tu venais de dire.
Tu ne fais pas les choses par obligation.
Tu ne fais pas les choses parce que tu dois les faire.
Tu ne fais pas les choses pour plaire aux autres.
C'est un des points qu'on va aborder un petit peu plus loin.
Parce qu'effectivement, tu n'es pas réellement mis en avant.
Si on ne fait pas gaffe, on peut ne pas savoir qui tu es, à quoi tu ressembles et avoir particulièrement d'informations sur toi par rapport à tes photos.
Mais dans ta démarche, tu as fait un zine que tu m'as offert, que je te remercie beaucoup, qui est très beau.
Mais tu as fait un zine où tu as peint les couvertures.
Tu as vraiment eu cette démarche d'aller loin là-dedans.
Je voudrais qu'on en parle.
En fait, ça faisait quelques années que je faisais de la photo.
Et puis Instagram, ça fait deux minutes.
Surtout qu'en plus, avec le nouvel algorithme, on te pousse toujours à faire de la photo, tout le temps, et de poster tout le temps, sinon tu perds en visibilité, etc.
Et c'est contre-productif pour le coup.
Je voulais aussi contre-carer ça.
Et dire, Internet, c'est bien, merci.
Mais je vais servir un peu de ce qu'Internet m'a donné.
Instagram, c'est grâce à Instagram qu'on est là.
Donc je me suis dit, je vais faire du papier.
C'est ce que j'ai toujours voulu faire, dès le départ.
Ça a toujours été un objectif.
Et d'un coup, ça a eu un coup de tête.
J'ai fait ça.
Et donc je me suis dit, je vais tout faire moi-même.
En fait, j'avais peur de démarcher un éditeur et qu'il me dise, non, tu ne mets pas ça, tu ne fais pas ça, tu ne fais pas ça, non, je n'avais pas envie.
J'avais un peu de sous de côté pour le coup.
Donc je me suis dit, je vais le faire.
Et je me suis toujours dit, j'allais faire la peinture de mes couvertures.
Parce que je pensais au livre d'Henri Cartier-Bresson.
J'ai pensé à lui et je me suis dit, tous mes livres, c'est moi qui vais faire mes couvertures.
Je me suis dit ça.
Je trouve que c'est une super approche.
On parlait de mimétisme tout à l'heure.
Mais c'est des belles choses à imiter.
Franchement, c'est quand même déjà parce qu'il faut être capable de peindre.
Même si je me rends compte que j'ai deux enfants qui sont jeunes.
On ne va pas dire que ce sont des super grands artistes qui font des dessins d'enfants de 4 et 6 ans.
Mais le plus important, c'est de démarrer.
C'est de faire au départ quelque chose.
Après, c'est bon, c'est pas bon.
Ça ne plaît à un, ça ne plaît pas à l'autre.
On s'en fout.
C'est à toi que ça doit plaire et tu dois être heureux de l'avoir fait.
Mais c'est beau d'avoir fait la démarche d'imprimer pour quelqu'un dont ce n'était pas le métier à la base et dont ce n'était même pas ta formation.
Internet.
Spontanément, aujourd'hui, les gens qui se mettent à la photographie et qui s'en approchent sur Internet, le réflexe, c'est jamais d'imprimer.
Non, c'est jamais d'imprimer.
Après, c'est quand même une grande importance, l'objet.
J'avais l'impression que ça immortalisait mon travail.
Même si Internet, les photos restent, etc.
Je ne veux pas dire que mon travail n'était pas pris au sérieux, mais pour qu'il soit pris au sérieux, il fallait qu'il soit sur papier.
Donc, j'ai fait ce livre-là, j'ai contacté un poète que j'ai connu sur Instagram parce que j'avais organisé une rencontre entre photographes il y a quelques années.
Il y avait quand même pas mal de monde, 50 personnes.
Je me suis dit, il y a du monde.
Et il y avait ce poète-là qui était venu.
Depuis, on a gardé contact.
C'est lui qui a fait la petite phrase dedans à l'intérieur.
Donc, ça veut dire que tout le livre, ce n'est pas du rapporté, c'est que du vrai, on va dire.
C'est hyper important.
Mais ce n'est pas quelque chose d'évident pour la plupart des gens.
Moi, je considère aussi que c'est important d'imprimer ses photos.
J'ai constaté par le passé, le zine, je l'ai fait souvent en un seul exemplaire, mon année en photo.
Et quand tu présentes ton travail à quelqu'un, tu vas au salon de la photo et tu arrives avec un zine, ou tu arrives avec ton smartphone ou ton iPad à la main, ce n'est jamais la même chose.
Même avec des clients mariage.
J'ai eu cette discussion il n'y a pas longtemps, je crois que c'était avec Amélie, l'épisode juste avant le tien.
Je suis censé, si je veux vraiment faire le professionnel, ne publier que du mariage sur mon Insta.
Mais je n'ai pas envie d'avoir deux comptes distincts pour tout ce que je fais.
J'en ai déjà plein entre le podcast, mon ancien compte, mon nouveau compte.
Je fais street, mariage, tout ce que je fais sur les mêmes comptes.
A priori, c'est très contre-productif, parce qu'il y a plein de gens qui ne comprennent pas ce que je fais.
Sauf que les gens qui comprennent ce que je fais, ce sont mes clients parfaits.
Et il y en a.
Ils sont rares.
Je n'en ai pas 50 par an, mais j'en ai trois.
C'est génial, parce que ces trois-là, je suis le plus heureux du monde à les faire.
Je me suis rendu compte que quand je vais les voir, j'amène un de mes résumés de l'année de street photographie et je leur montre ça.
Et en fait, tu n'as pas le même regard que quand tu arrives avec ton iPad et qu'il va regarder ce que j'ai fait, ou que tu arrives à écrire en disant « Vous avez vu mon site ?
» Tu arrives avec un bouquin.
Tu es un artiste génialissime.
C'est vrai.
Ça donne direct du cachet.
Et puis les gens comprennent un peu mieux les choses.
Internet et les réseaux sociaux, ça démocratise tout ça, tout le monde.
Tout le monde peut mettre sur Internet.
Oui, tu es un mec lambda, parle plein de mecs lambdas.
Ce qui va déterminer celui qui prend les choses au sérieux, c'est celui qui prend la démarche de faire tirer ses photos, de les imprimer, de les montrer.
C'est ça, parce qu'en vrai, on se noie un peu dans la masse sur Internet.
Avec les autres, des bons, des moins bons, des mauvais.
Chacun fait ce qu'il veut, mais quand tu tires, il y a une démarche.
Et c'est ça qui est le plus important.
D'accord.
Il y a une chose qui m'a tout de suite attiré dans ta photo, la première fois que j'ai regardé ta page, et les fois suivantes, ça s'est confirmé, c'est que tu ne cherches pas, c'est la continuité de ce qu'on vient de dire, tu ne cherches pas à te mettre en avant.
Tes photos, elles existent par elles-mêmes, elles racontent leur histoire.
Leur histoire, ce n'est pas la tienne.
Toi, tu es juste la personne qui tient la photo.
Finalement, le seul truc qui va attirer l'attention sur ta personne, c'est ton pseudo, et de temps en temps, un portrait fait par quelqu'un qui est sorti avec toi.
Mais en vrai, on peut tout à fait passer à côté de ta personne en regardant tes photos.
Pour le pseudo, j'avais mis le petit gars noir, parce que j'avais remarqué qu'il y avait beaucoup de personnes qui faisaient du noir et blanc sur Instagram, en serait-ce photographie, il y en avait quand même pas mal.
Et je trouvais que c'était un nom qui résonnait bien, qui avait résonance.
Et le petit gars noir, pourquoi ?
Parce que je suis un petit homme.
Ouais, je suis un mec à 38, mais...
Je m'attendais, tu sais quoi ?
Je me posais la question avant que tu arrives, comme on ne s'était jamais vu, je me suis dit, est-ce qu'il est vraiment petit ?
Parce qu'il n'a pas l'air petit.
Non, je ne suis pas petit.
Je suis petit dans ce monde.
Je suis petit sur Paris.
Je suis petit où je vais, en fait.
C'est tellement vaste, que c'est pour ça, le mot « petit », c'est avec humilité.
Je viens avec humilité, photographier les gens qui sont à Paris.
J'ai fait un peu Tokyo aussi.
Comme je te dis, j'étais un peu dans le mimétisme de Daido.
Je suis parti là-bas avec l'imite.
Franchement, c'est un des plus beaux voyages qu'on peut faire en photographie, ça.
C'est incroyable.
C'est un pays tellement fou, le Japon.
Je pense que j'en repartirais là-bas.
Et donc voilà.
Donc le petit gars noir, c'est pour ça.
Et il y a un peu de poésie en plus dedans, du coup.
Oui, toujours.
Toujours.
La poésie, c'est important.
Et oui, non, je me mets pas...
Je me mets toujours en retrait, moi.
Dans ce que je fais, dans la photographie.
Est-ce que c'est mon côté soignant qui fait ça ?
Qui laisse toujours la place à l'autre ?
Et qui laisse exprimer les personnes ?
Je pense que c'est ça.
Ou est-ce que c'est pas juste la bonne façon de faire des photos qu'on a oublié parce que tout le monde est trop occupé à se mettre en avant ?
Peut-être.
Prends tous les boulots.
Je pense que t'as dû t'aviser le même que moi, mais on doit être inspiré à peu près par les mêmes choses.
Quand tu prends un beau livre des années 80 où il n'y avait aucun moyen de partager autre qu'un bouquin, ton travail, c'est rarement le photographe la star du livre.
Non, c'est vrai.
Il y a son nom sur le truc, parce que c'est lui qui a fait le boulot, mais tu prends un subway de Bruce Davidson, jamais tu...
Enfin, tu as écrit son nom sur la couverture, encore une fois, mais c'est pas un livre à propos de lui.
Moi, j'aimerais bien que mes photos parlent d'elles-mêmes.
Si tu regardes bien sur mes photos, je mets jamais de légende, par exemple.
Jamais.
Je parle du principe que chacun est libre d'interpréter ma photo comme j'ai envie de l'interpréter, et la personne d'à côté de moi d'une autre manière.
Et c'est ça qui est important, en fait.
La photographie, c'est la même chose que...
C'est un médium.
Si je regarde une peinture, par exemple, je vais l'interpréter d'une manière, l'autre d'une autre.
J'aime pas légender.
J'ai l'impression que je suis en train de diriger l'esprit de l'autre.
Et si je légende, c'est vraiment parce que il peut avoir ambiguïté.
À ce moment-là, je peux légender, mais sinon, je ne légende jamais.
Après, ça, c'est des grands débats, la légende.
Est-ce qu'il en faut une, est-ce qu'il en faut pas une ?
Il y a des partisans, il y a des gens qui sont totalement contre.
Si vous entendez ma voix qui se casse, c'est parce que mes enfants sont malades et j'ai été gentil, ils ont partagé avec moi.
Il y a une autre chose qui m'a parlé, ça je te l'ai dit dès que t'es arrivé, c'est, je pense que c'est le déclencheur.
Alors, ça fait longtemps que je te suis, mais il y a plein de gens que ça fait longtemps que je suis.
Il y a un temps, en fait, pour les invitations.
Et l'autre jour, je regardais ce que je fais souvent, je tourne sur Instagram, je regarde qui j'ai dans mes contacts, avec qui j'ai envie de parler en ce moment.
Et je me remets sur ta page Instagram et je commence à défiler et j'ai cette chanson de Doc Gineco qui me revient dans la tête.
Donc, Doc Gineco, je suis Doc Gineco, première consultation 96.
J'avais 20 ans.
Donc, c'est un des albums de ma jeunesse.
Aujourd'hui, les trois qui me restent de cette période-là, c'est donc celui-là, La bonne attitude de Sinclair et MC Solar.
Et en fait, il y a une chanson qui s'appelle Dans ma rue, qui est certainement un de ses chefs-d'oeuvre.
Alors, c'est Doc Gineco, avant qu'il tombe dans la marmite.
Maintenant, c'est plus tout à fait la même personne.
Et c'est dommage parce qu'il nous a fait un peu un Ronaldinho, tu vois.
Un mec qui dégueule de talent, qui aurait pu faire un truc extraordinaire et puis qui a choisi de faire l'autre passion, la passion égoïste pour lui, en fait, de ne pas nous faire profiter de ce qu'il pouvait.
Mais bon, il nous a donné quand même un chef-d'oeuvre.
Et je retrouvais en fait cette chanson dans tes photos.
Ce qui était quand même fou.
Et c'est ce qui va nous amener à plein de discussions sur ce que c'est de voir les choses, ce que c'est de les rapporter.
Parce qu'en fait, Doc Gineco, dans cette chanson-là, pour moi, c'est un street photographe.
C'est quelqu'un qui fait plein d'images de la rue.
Je vais juste reprendre les paroles.
Alors, je n'ai pas le droit de diffuser la chanson parce que, voilà, je peux avoir des problèmes pour ça.
Mais les paroles, je vais lire juste le début parce que ça résume bien.
« Dans ma rue, les lascars se serrent la main.
Ce n'est pas comme dans le showbiz où les mecs se font la bise.
Dans ma rue, les Chinois s'entraident et se tiennent par la main.
Les youpins s'éclatent et font des magasins.
Et tous les lascars fument sur les mêmes joints.
Dans ma rue, c'est une pub pour Benetton.
Et tout le monde écoute les mêmes sons à fond.
Mangeurs de cachères ou de saucissons.
» Et en fait, toutes ces images qu'on voit là, parce que c'est que des images, c'est un peu comme un petit délire.
C'est un peu comme un petit délire.
C'est un peu comme un petit délire.
C'est que des images.
Je les ai trouvées chez toi.
C'est le melting pot.
Toutes les couleurs.
Toutes les races.
Toutes les religions.
Tu les as toutes illustrées.
Presque, tu aurais pris la chanson, tu aurais dit « tiens, je vais faire un clip ou un diaporama de cette chanson.
» En fait, tu l'as fait.
Ben écoute, ça me fait plaisir.
Après, je pense que c'est d'où j'ai vécu.
J'ai grandi avec toutes les origines, toutes les religions.
Les musulmans, les chrétiens, les protestants, les juifs.
Pour moi, c'est logique.
J'ai toujours eu cette relation-là avec tout le monde.
Et je pense que ça se ressent aussi dans mes photos.
Je ne fais pas de différence.
Je ne fais pas de différence.
Je peux faire la différence.
Je fais de la photographie.
Que les noirs, que les trucs, etc.
Si il se trouve que la personne...
Si il se trouve que la situation est photographiable, j'ai la photographie.
Je ne me pose pas la question.
C'est triste de dire « je ne vais faire que ça ».
C'est clair, on se ferme.
C'est une chose d'être conscient de l'accès qu'on peut avoir, mais c'est autre chose de s'y limiter totalement et de refuser tout le reste.
Je n'ai pas eu la chance de vivre avec tout le monde.
Tout le monde est chez moi.
J'ai une famille où j'ai la chance où on est très ouvert d'esprit.
Très ouvert d'esprit.
Et donc, c'est aussi l'éducation, beaucoup.
Je peux remercier mes parents pour ça.
C'est vrai, de toute façon, on se rend compte, et tu vas voir, ça ne se rend pas avec le temps.
On se rend compte avec le temps qu'on ressemble de plus en plus à ses parents.
Oui, grave.
J'ai commencé à réaliser autour de 25 ans.
A 35 ans, j'ai dit je commence à ressembler à mon papa.
A 46, je suis la copie conforme de mon père.
Il faut l'accepter.
Un mot donné, on le repousse.
Mais un mot donné, maintenant...
Je vais même te dire, Pierre, je me rends compte que mon père me rappelle mon grand-père maintenant.
Donc ça ne fait que s'accentuer avec le temps.
C'est ça.
Ce parallèle avec cette chanson, avec cette musique-là, même avec la musique en général, on parle des inspirations.
Les gens disent, on va te sortir les films parce que c'est un medium assez proche.
Il y a des gens qui disent la musique des fois.
Et je crois que jusqu'à maintenant, je n'avais pas réellement compris ça.
Non, mais c'est vrai.
Après, où je photographie, c'est un peu le dixième, le dix-huitième.
Ce sont des endroits où il y a du monde.
C'est bondé de monde.
Il y a des vendéras sauvettes, des coiffeurs, il y a tout.
Est-ce que les coiffeurs racontent des blagues aux dealers ?
Non, je ne sais pas.
À l'époque, quand j'avais des cheveux, ils me donnaient des blagues.
Personnellement.
Donc, c'est des endroits que je connais.
Je connais les codes, parce qu'il y a des codes quand même.
Quand je dis des codes, c'est qu'on sait où il faut aller, où il ne faut pas aller, on sait quand faire de la photo, on sait quand ne pas en faire.
On sait qui il ne faut pas photographier.
Donc voilà.
C'est vrai que ça ressemble où j'ai habité, les gens avec qui j'ai côtoyé.
C'est pour ça, peut-être, que ce sont des endroits qui me parlent.
C'est familier.
En tout cas, voilà le parallèle.
Je crois que tu es la personne idéale pour faire ce parallèle-là.
Parce que finalement, tu touches un peu à tout.
Et du coup, dans le même temps, je ne l'ai pas fait avant d'avoir vu que tu peignais.
Après avoir vu que tu peignais, je l'ai fait avant.
Donc du coup, je me suis dit vraiment, c'est fou quand même, parce que dans le genre touche à tout, c'est quand même une belle illustration.
Oui, bien sûr.
Je suis très curieux.
À une époque, je faisais des clips vidéo, des trucs.
Je suis très curieux, j'aime bien toucher à plein de choses.
Je pense que je suis un hyperactif, je crois, mais je ne suis pas sûr.
Il y a un truc à creuser en tout cas.
Du coup, tout ça, ça me fait me dire que tu as peut-être un message, puisque dans les chansons, il y a toujours un message.
Comme je fais le parallèle entre les deux, tu as un message, tu as peut-être des observations à faire sur le monde et les gens.
Et c'est ta manière de les exprimer ?
Je pense que ma manière de photographier, en tout cas, ce que je photographie, pour ma part, c'est le pari de ma vision.
C'est la vision que j'ai de Paris.
Personnellement, moi, quand j'allume la télé, c'est très rare d'ailleurs, je ne retrouve pas le pari que je vois.
Quand je prends le métro, quand je regarde la télé, quand je regarde des films français, je ne retrouve pas le pari que j'ai toujours connu.
Moi, j'ai 33 ans, ce n'est pas le pari que je connais.
Et j'ai l'impression que je documente.
Et tu sais, des fois, ils disent « ah non, la photo de rue, c'est interdit ».
Bon, il y en a beaucoup qui parlent, ils ne savent pas de quoi ils parlent.
C'est très fréquent.
Et je leur dis, je leur dis « mais vous préférez quoi ?
Vous préférez les photos encadrées, que vous voyez à la télé, qui ne reflètent pas la réalité ?
Ou nous, jeunes photographes qui essayent de documenter et j'espère que vous nous direz merci dans 10, 15, 20, 25 ans, 30 ans.
C'est ça la réalité.
En tout cas, moi, j'essaye de photographier une partie de Paris.
Marc, Antoine ou Mohamed, j'espère qu'ils photographient une autre partie avec sa vision.
Et à ce moment-là, nous, on réunit tout ça, comme les photographes de New York, à une certaine époque.
Oui, c'est les regards différents, en fait, qui font une vue générale de la ville, et plus réaliste en tout cas.
Exactement.
Et c'est ça qui est important.
Et je dis New York, mais ça peut être Tokyo, parce que c'est les deux les deux villes qui me parlent en termes photographiques.
C'est des bonnes références.
Du coup, je dis tu photographies Paris, tu photographies pas Paris, tu photographies les Parisiens, en fait.
La ville, je la vois, je reconnais tous les coins, je peux te dire précisément où tu es, j'y vais aussi.
Mais chez toi, la ville, elle est totalement en arrière-plan.
C'est vraiment les gens au premier plan.
La différence entre Paris, New York et Tokyo, je veux dire, c'est que la ville, elle est photographiable, mais c'est pas géométrique comme les autres villes que j'ai citées.
Et ça peut vite tomber sur du Brassaï, sur du quartier Bresson.
Et puis moi, j'ai été...
J'ai appris la photo de rue, avec internet, et beaucoup avec ces artistes-là.
C'est très frontal.
C'est très frontal, c'est l'humain avant tout.
Et donc je pense que c'est ce que j'ai appris, en fait.
Je pense que si j'aurais appris autre chose, peut-être que je fais de l'art du noir et blanc, parce que les artistes qui m'ont inspiré, c'est Gary Winogrande, Vivian Maier...
Pour moi, c'est le boss des bosses.
Vivian Maier, tu parlais d'elle, je ne l'ai pas dit tout à l'heure, mais quand tu parlais de l'appareil photo, d'avoir un truc mythique, il y a eu une expo sur elle il n'y a pas longtemps, j'imagine que tu as été la voir.
Il y avait ses appareils photo dedans.
Je trouve ça extraordinaire, en fait, de voir l'appareil qui a servi à faire les photos que tu regardes.
Elle est incroyable.
J'avais regardé son documentaire.
Je n'ai pas lu le livre, mais je pense que le livre et le documentaire, ça doit être un peu similaire.
Il y en a plusieurs, des livres.
Il y en a un qui est bleu, qui s'appelle Vivian Maier, révélée, il me semble, ou quelque chose comme ça.
Et le livre est extraordinaire.
Après, c'est très personnel, il y a une analyse de sa personnalité, de ses différents traumatismes, à travers tout ce qu'on sait d'elle, en fait.
Je pense qu'elle a été très traumatisée.
Moi qui pense, c'est dans le livre, elle estime qu'elle a été très traumatisée.
Mais par contre, le livre est passionnant.
Vraiment.
Ça se trouve dans ma revanche.
Je pensais que c'était à peu près la même chose.
Le documentaire a été réalisé au tout début, quand on commençait à la découvrir.
Et l'air de rien, c'était il y a 10 ans.
Donc, en 10 ans, on a eu le temps de découvrir beaucoup de choses, notamment de développer beaucoup plus de photos, de retrouver beaucoup plus de témoignages, d'enquêter plus sur elle et de retrouver des documents.
Et du coup, le livre est beaucoup plus fouillé.
Le documentaire était bien, mais le livre est beaucoup plus fouillé.
Mais par contre, ça se lit comme un roman, c'est très bien écrit.
Et c'est passionnant.
Vivian Maier, moi j'ai quand même pas mal de références.
Grandin Park, par exemple, ou un peu plus contemporain, André D. Wagner, Daniel Arnold.
En tout cas, parce qu'on parle beaucoup des anciens artistes, et des fois, ça m'embête un peu, parce qu'il faut aussi parler des artistes actuels.
Mais Vivian Maier, j'adore son travail, mais c'est elle, on va dire, qui m'a mis un peu dans la photo de rue.
Parce qu'en fait, son travail a été découvert il y a 10 ans, et il y avait tout un truc sur Vivian Maier, il y avait tous les sites, etc.
Et en fait, c'est venu sur moi par hasard, en fait.
Vraiment par hasard.
Et quand j'ai vu le truc, on dirait une femme décédée, on a retrouvé ci, on a retrouvé ça, et je vois les photos, et je dis, waouh, c'est quoi ça ?
C'est incroyable ce qu'elle fait.
Moi je faisais beaucoup de peinture à l'époque, et en fait, la claque que j'ai eue, c'est que en un déclenchement, j'avais l'impression que elle me donnait de l'émotion de la peinture où je mettais 3, 4, 5 jours dessus.
Et je me dis, mais je perds mon temps, en plus j'étais en autarcie, j'étais toujours chez moi, faire de la peinture, tac, tac, tac, j'étais enfermé aux autres, et je me dis, non Thierry, je pense que c'est ce que tu dois faire.
Et donc j'ai commencé avec mon appareil photo pendant un mois, et ça m'a vite saoulé, et je me suis acheté un appareil photo.
Mais après, entre temps, j'avais fait plein de recherches, parce que moi je suis comme ça, je suis appassionné quand j'aime, je fais des recherches, je fais des recherches, et je suis tombé sur Dado Mariama.
C'est marrant parce que tu parles de l'influence qu'elle a eu sur toi, il y en a une autre que moi je vois, c'est justement ce côté où tu fais des photos pour toi, parce qu'elle a fait que pour elle, elle a jamais cherché à être connue.
Apparemment elle a cherché un moment, mais pas plus que ça, et finalement ça aussi, ça a eu une influence sur toi, dans le sens où tu fais tes photos pour toi, tu les partages après, mais tu les fais pas pour les partager.
Je pense que la chance que j'ai eue, c'est quand je me suis intéressé à la photo, je me suis intéressé aux bonnes personnes.
Donc forcément, maintenant, ça a un impact sur mon travail.
Aujourd'hui, si je fais pas de la couleur, c'est parce que peut-être que les premiers, c'est pas Harry Gilouret à l'air, ou je sais pas, des... ou...
Enfin bref, des artistes...
Les soliders, je pense.
Qui font de la couleur.
C'est pas eux qui j'ai vu en premier.
Et ça se trouve que si c'était eux qui j'aurais vu en premier, peut-être que j'aurais pas spécialement aimé.
En arrivant, je trouve que il est très important pour définir l'homme.
C'est une autre approche.
Ça raconte pas la même chose.
Il y a moins un côté...
Je pense aussi que ce qui joue dans le noir et blanc, c'est peut-être le côté un peu nostalgie.
Parce que la photo, elle vieillit.
Une photo, aujourd'hui, elle a pas la même valeur que dans 20 ans.
Et peut-être que de ce point de vue-là, le noir et blanc entre guillemets, vieillit mieux.
Il vieillit mieux, après, moi j'ai un avis un peu sur la couleur, que j'adore.
Franchement, des fois, je veux des photos en couleur, je dis wow, c'est trop bien et tout.
Mais je me mets...
Je me dis que...
J'essaye des fois d'en faire un petit peu, mais je trouve que ça me correspond pas.
Je trouve que la couleur, elle oriente quand même pas mal.
Je trouve qu'elle a ce côté séduction, séductrice, quoi.
Il y a du rouge, je vais regarder.
Il y a du jaune, je vais regarder.
Et moi, j'ai besoin qu'on se concentre sur la personne, en fait.
Et je trouve que la couleur, des fois, elle déconcentre un petit peu.
C'est une autre approche, après.
Avoir de la couleur dans une image, ça demande, la plupart du temps, une bonne gestion sur si tu veux construire une image réellement.
C'est pas la même approche.
C'est beaucoup plus de réflexion et du coup, je pense que ça peut aussi être plus une approche de pêcheur que de chasseur.
C'est ça, exactement.
C'est pas à tous les coups, mais en tout cas, dans ta réflexion, tu dois en tenir compte et c'est vrai que peut-être que le noir et blanc t'autorise un petit peu plus de liberté aussi.
C'est à réfléchir.
La question suivante, c'était que t'avais les codes de la photo de rue new-yorkaise.
À Paris, t'as commencé à y répondre, mais c'est vrai que c'est quelque chose, quand on en parle, on a l'impression que les New-Yorkais ont justement ce terrain de jeu extraordinaire et que c'est difficile de reproduire ailleurs.
Et toi, en fait, tu y arrives.
Oui, j'y arrive parce que je me suis quand même pas mal inspiré.
Moi, je parle pas beaucoup de matériel et de technique, mais la technique, il faut la savoir pour essayer de s'en franchir.
C'est une réalité.
Et donc, je travaille beaucoup à une grande vitesse.
Je suis toujours à un millième, tout le temps.
Parce que j'ai besoin d'être rapide, pour pas qu'on me voit. J'ai besoin d'être rapide tout le temps.
Et donc, ça, c'est ce que j'ai appris chez les Américains.
J'ai appris chez les Japonais aussi parce que c'est aussi très frontal, même plus, je crois, par moment.
Et donc, j'ai toujours été fasciné.
Cartier-Bresson, Brassail, Doisneau, Willy Ronis, je les connais tous.
C'est pas une photographie qui me parle plus que ça.
C'est une photo humaniste.
Mais c'est pas une photo qui me...
C'est très calme.
C'est plus vieux, en fait.
C'est pas le même matériel.
Il y a la photo de rue française.
Il y a un trou dans la timeline.
À un moment donné, j'ai l'impression qu'il n'y avait plus de personnes qui faisaient de la photographie de rue.
Comme si c'était une pratique qui était dédiée que aux anciens.
Et là, ça commence à avoir ce renouveau, aujourd'hui.
Mais ailleurs, ça a toujours continué.
C'est pas faux ce que tu dis.
Tu sais que je réalise qu'en fait, je serais pas forcément capable de te citer un street photographe des années 70 à Paris.
Il y a un trou.
Après, il y a aussi le grand défaut et la grande richesse de la France.
C'est qu'on a beaucoup d'artistes incroyables.
Ce qui veut dire qu'on est un peu rompus de tout ça.
Et que...
On se contente de ce que les anciens ont fait.
Et qu'on se rend pas compte que si on se contente que de ce que les anciens ont fait, on n'aura plus rien pour nous dans 10, 15, 20 ans.
C'est un gros trou.
On aura des images de BFM, de CNews, et c'est tout.
Tout le problème de la photo, c'est qu'on réalise pas sa valeur avant d'en avoir besoin.
Et quand on en a besoin, c'est souvent 10 ans plus tard.
C'est assez vrai.
On va aborder un autre aspect de ta pratique photographique, qui est que tu tentes des choses différentes.
On a parlé de street photographie jusqu'à maintenant, mais par exemple j'ai vu...
Donc t'as un ami qui s'appelle Ousmane, avec qui tu sors pas mal.
Tu as fait un portrait de lui en studio, avec un autre appareil que ton Leica, avec...
Je sais plus le modèle en tête, mais...
C'était un...
C'est un moyen format 6.6.
Mamiya ?
Non, non, c'est pas Mamiya.
Je te le dirai.
Je mettrai la photo avec toutes les infos dessus.
T'as fait un portrait posé qui était très réussi de ta maman, que je trouve touchant.
Parce qu'il y a tout le côté émotionnel qui peut aller avec, qu'on voit ressortir de la photo.
T'as pas peur d'expérimenter des choses, de te lancer dans quelque chose, de le partager, parce qu'on peut le faire et ne pas le partager aussi.
C'est une option.
Toi, tu y vas.
C'était une période aussi où j'avais besoin de faire autre chose que la photo de rue.
Quand on regarde bien les grands photographes, ils faisaient de la photo de rue, mais ils faisaient autre chose à côté.
Soit ils faisaient de la photo de mode, soit de la photo de reportage, etc.
Mais en tout cas, ils se diversifiaient.
Donc ça, c'est quelque chose qui a été ancré dans ma tête dès le départ.
Je fais quand même pas mal de photos de rue, mais à un moment donné, je voulais faire un petit peu autre chose.
Et je voulais faire un peu de portrait.
Et ce qui m'est venu en premier, c'est de photographier ma mère.
En plus, surtout que j'avais acheté l'appareil photo.
Je me suis fait avoir, j'ai acheté sur le Boncoin.
L'appareil photo, il m'a coûté très très cher.
Et donc, j'ai dû le réparer.
Et j'ai fait un test sur ma mère.
Et j'ai fait la photo.
Et sans prétention aucune.
Mais c'était un joli test quand même.
Oui, c'était un joli test.
Je pense que je vais le refaire encore mieux.
Et donc, pour moi, c'est important de faire autre chose que la photo de rue, tout le temps.
Ça me permet de me diversifier, ça me permet d'être plus calme, d'être plus posé.
Parce que la réalité, c'est que la photo de rue, on contrôle pas tout.
On contrôle même pas grand chose.
La lumière, on la contrôle pas, les gens, on la contrôle pas.
On contrôle pas.
Des fois, on oriente, mais on contrôle pas tout.
Et c'est vrai que quand tu fais un peu du portrait, tu contrôles.
Et c'est plus calme, c'est plus posé.
C'est pour ça que j'aime bien faire un peu les deux.
Ça fait un peu balance, on va dire.
Du coup, ça t'a appris des choses dans ta manière de communiquer avec les gens ?
T'as recoupé des choses par rapport à ta partie de la street, ou ça n'a rien à voir ?
Non, ça n'a rien à voir.
La première fois que j'avais fait ça, je transpirais de ouf.
Je stressais, c'était bizarre.
Quand j'avais photographié mon ami.
Parce que c'est autre chose.
Il faut discuter, il faut parler.
Tu mets l'œil dans...
Il faut cadrer.
Il faut être sûr de ce qu'on fait.
Que la photo de rue, c'est l'énergie que tu recherches.
T'as l'impression que si tu sais pas ce que tu fais en photo de rue, on va pas s'en rendre compte.
Voilà, exactement.
Moi, sur la photo de rue, je cherche l'énergie plus qu'autre chose.
C'est l'énergie la plus importante.
Même sur le portrait ?
Oui, aussi.
C'est vrai.
C'est juste que tu l'obtiens pas de la même manière.
Dans le portrait, je crois que c'est un peu toi qui es obligé de l'insuffler.
Alors que dans l'autre sens, elle t'arrive dessus et tu l'attrapes.
T'as juste à te mettre sur son chemin.
Du coup, dans ta manière de shooter en street, je m'étais demandé si tu travaillais beaucoup en hyperfocal, si tu visais ou si tu y allais par exemple de la hanche en pré-réglant simplement ta distance de mise au point.
Mais en gros, la question, c'était ça.
Moi, j'ai un 28mm.
C'est un grand focal.
Et en fait, ça me permet de l'utiliser exprès parce que ça me permet d'avoir de maximiser mes chances d'avoir une personne dans mon champ.
Voilà, le 26.
L'inconvénient, c'est que tu dois être prêt parce que plus t'es loin, plus ça fait vide.
Donc forcément, c'est pour ça que je suis toujours prêt.
Après, au niveau des réglages, moi, comme je t'ai dit tout à l'heure, je suis en vitesse.
Je suis très rapide.
Donc forcément, la vitesse, tu la cales par rapport à ton ouverture.
Généralement, quand il y a un peu moins de lumière, tu ouvres un peu plus, etc.
Donc voilà.
Tu peux me voir à 2, 8.
Tu peux me voir à 8.
Ça dépend de la lumière qu'il y a.
Un jour très ensoleillé, ça va être un peu plus.
Et en termes de process, par exemple, il y a une série photo sur ta page.
T'es en train de prendre un SDF qui fait sa toilette sur un arrêt de bus.
Il y a plusieurs photos.
Tu t'en parles en disant voilà mon process.
Mais clairement, tu y tournes autour.
Il te voit. Il sait que t'es là.
Comment ça se passe ?
Ça, c'est une époque où je pense que je venais d'avoir mon appareil.
Ça faisait pas très longtemps que je l'avais.
Donc j'étais tout excité.
T'avais encore l'adrénaline qui te poussait à faire des trucs comme ça.
J'étais tout excité.
Et en fait, il visait pas sa toilette.
C'était un monsieur.
D'ailleurs, je le remercie parce que c'est une très bonne photo.
Je pense que c'était une photo majeure de mon travail.
Et il prenait du gel hydroalcoolique.
Et je pense que c'était pour le boire en fait.
Ouais.
En fait, quand tu...
En tout cas, moi, en tant que soignant, j'ai bien vu quand t'es en sevrage.
Et donc, je pense que c'était pour ça.
Et en fait, je l'ai vu et je l'ai pris en photo et c'est vrai qu'il m'a vu à un moment donné.
Et il est pas que lui en fait.
En fait, faut savoir qu'en photo d'horreur, c'est pas la personne qu'on photographie qui est dérangé.
C'est souvent les autres.
C'est souvent les autres qui vont dire « Ah, qu'est-ce que vous faites, monsieur ?
Vous avez pas honte ?
» « Non, non, non.
Dieu merci.
» On m'a jamais interpellé.
J'ai toujours été assez discret.
J'ai toujours senti le truc de pas y aller ou d'y aller.
J'ai des amis photographes qui se sont déjà fait agresser.
Moi, jamais pour le moment.
Est-ce que parce que je suis grand ?
Je pense que le fait d'être grand et poste ça va quand même un peu aider.
Donc, non.
Ouais, je l'ai vu.
J'ai pris une photo et je me suis dit « Non, la scène n'est trop bien pour que j'en prenne qu'une seule.
» Et donc, à ce moment-là, j'en ai pris deux, trois.
Et oui, il m'a vu.
Au moment où il m'a vu, je crois que j'ai arrêté.
Je m'en rappelle plus.
Et après, je suis reparti.
Et j'étais tellement pressé de voir le résultat.
Et puis, j'étais content du résultat.
Et c'était une des seules fois où j'ai mis l'œil dans le viseur.
Donc, c'est vraiment...
Du coup, pour montrer ton process, t'as pris le seul truc où c'était pas vraiment ton process ?
Bah, en fait, au début, je ne m'étais pas.
Et pour être sûr, je l'ai mis.
J'ai pris le risque.
Elle est réussie, en tout cas, la photo.
Dans ton feed, alors on va plus aller du côté des reels, mais t'as pas mal de références artistiques.
Clairement, t'as une vraie culture artistique.
Et t'as partagé des choses d'artistes.
On en a parlé un petit peu plus tôt.
Mais notamment, dans ce que t'as partagé, t'as questionné la représentativité, t'as questionné le fait de qui tient la caméra, qui tient le pinceau.
Parce que l'extrait exact, c'est qui tient le pinceau.
Et la façon dont le sujet, du coup, est traité ou vu par le monde.
Et les deux exemples que tu postes...
J'aborde ce sujet-là parce qu'en fait, c'est deux exemples sur une dizaine de vidéos.
Donc, ça fait quand même un cinquième.
Je pense que c'est un sujet qui te tient à cœur quand même.
C'est Basquiat qui dit qu'il y a peu de peintres noirs.
Et c'est Sabine Weiss qui dit que souvent, je suis la seule femme au milieu de plein d'hommes.
Et je suis traité...
On parle de Sabine Weiss dans les années 70 ou 80.
Je suis traité comme une femme, entre guillemets, dans un monde d'hommes.
Oui, mais moi, c'est important pour moi parce que je suis une personne noire, issue de la banlieue.
Et donc, forcément, des fois, j'ai l'impression qu'en tant que photographe, en tout cas, c'est ce que...
Comment dire ?
J'ai l'impression que des fois, on entend autre chose de moi.
Moi, je vois beaucoup de photographes de ma génération qui viennent, qui sont issus du même milieu que moi et qui...
On leur demande des choses.
Et moi, j'ai pas envie forcément de les faire.
On leur demande quoi ?
De photographier des Air Max, la cité...
T'as le droit de t'intéresser qu'à la street, en fait.
Voilà.
La street photographie, la culture street.
Voilà, exactement.
Et moi, j'ai envie de m'affranchir de ça.
Je peux.
Moi, j'ai une culture street.
Bien sûr, moi, de moi, je connais plein de choses, y'a pas de soucis.
J'adore, en fait.
C'est d'où je viens.
Mais je suis pas obligé de le faire.
Oui, c'est pas parce que t'as un accès privilégié que t'es obligé de te cantonner à ça, toi.
Et des fois, je trouve que les médias, dès que tu les approches, on va te demander, t'es d'où ?
Tu viens, tu fais quoi ?
Quand tu montes ton travail, ils comprennent pas vraiment, ils se rendent à autre chose.
Tu vois ce que je veux dire ?
Ouais, le stéréotype.
Il faut que je photographie des rappeurs, des trucs.
Moi, ça m'intéresse pas.
Désolé.
C'est important aussi, je veux dire, on parlait en préparant, on parlait de Will Hendess.
Pour ceux qui connaissent pas, c'est un photographe noir américain qui vit à Détroit, qui a beaucoup photographié les gens de son coin.
Il a un accès privilégié à une population qui est noire et qui est très street.
Alors, les Américains, je veux pas qu'on interprète mal ce que je vais dire, parce qu'il y a beaucoup d'armes et des choses comme ça.
Mais en fait, les Américains, d'une manière générale, les armes, c'est comme les voitures chez nous.
Tu vas au forum du tuning en région parisienne, t'as les mêmes discussions là-bas entre tous les gars qui parlent des flingues.
Moi, j'étais à Miami, ma femme a vécu six mois à Miami, elle s'est fait plein d'amis et du coup, quand on y va, on a plein de potes.
Un jour, on était invités à dîner chez une de ces amies-là.
Et donc, les filles, elles sont d'un côté, elles papotent, et moi, je me retrouve avec les gars à papoter.
Et ça parle des flingues.
Et je te jure, c'est la discussion la plus surréaliste que j'ai jamais eue.
Parce qu'ils te sortaient des trucs et c'est quoi le calibre des trucs ?
Ils te sortent des munitions, ils te sortent le flingue devant toi.
Tu fais quoi là ?
Toi, tu parles de bagnole ou d'un appareil photo, eux, ils parlent de flingues.
Donc, je veux pas que ça soit mal interprété.
Non, non, parce qu'il y a des gens qui vont faire le lien en disant les armes, machin, truc.
Là-bas, c'est un sujet tout à fait normal.
Mais effectivement, le Finlandais, il a cette espèce de mix parce qu'il a accès à ça.
En même temps, il en est un petit peu sorti par moment.
Il arrive à en faire quelque chose d'autre.
C'est-à-dire qu'il a cet accès, mais il arrive à ne pas en faire une caricature du truc qu'on attend de lui, avant de partir en couille dans YouTube et de répondre aux demandes de l'algorithme en testant du matériel, malheureusement.
Ça me fait un peu chier qu'il devienne ça.
Parce que c'est un type qui a un talent fou.
Mais du coup, ouais, si on parle de l'accès à un certain type de sujet, tu peux l'exploiter mais en faire autre chose, en faire pas ce qu'on attend.
Non, non, bien sûr.
Après, je suis pas fermé.
Parce qu'on m'attrape par le col.
Ouais, Thierry, t'avais dit ça, etc.
Non, non, je suis absolument pas fermé à le faire.
Mais c'est vrai que des fois, on attend ça de toi, parce que tu viens de là, on attend ça de toi.
Et donc, non, non, non.
C'est pour ça que je parle beaucoup de ça, en fait.
Et ça m'a parlé, en fait, quand j'ai entendu Pascal dire.
Et justement, ils l'ont vu.
Lui-même, il en est conscient.
Si on l'a mis en avant, c'est parce que, voilà, il est noir, son travail est un peu pictural, un peu, voilà, un peu brut.
Et lui, il le sait.
Mais il a été intelligent, il a su en profiter.
Il a su le mettre à profit.
Bien sûr, bien sûr.
Et même, il le dit.
Bien sûr, il en a conscience.
Et c'est ça, l'intelligence, en fait.
C'est ça, l'intelligence.
Donc, non, non, non.
C'est pour ça que ça m'a beaucoup parlé.
Et ça parle à beaucoup de personnes.
D'accord.
C'est une belle façon de voir les choses.
On en revenait, pour moi, au côté dans ma rue, au melting pot un petit peu et tout.
C'est-à-dire que tu as le regard qu'on attend de toi, que t'es pas obligé d'accepter ou de renier.
Et en même temps, ce regard, tu peux l'appliquer à plein d'autres choses, en fait.
Et du coup, c'est ça qui fait qu'on est unique, au final.
Je pense que Basquiat, c'est ce qu'il a fait aussi.
Il y a ce que les gens, ils attendaient de lui.
Il a joué le jeu dans ses règles à lui.
Et en même temps, il en est sorti quand il avait pu en sortir.
Et ça ouvre l'esprit, quoi.
C'est clair.
Du coup, si je te demande ton message...
Mon message dans ma photographie ?
Ou dans ton art, de manière générale.
Parce que je pense qu'on peut dire...
Mon message, c'est s'ouvrir aux autres, comprendre, savoir écouter, et savoir observer.
Parce qu'on arrive à une période où on n'observe pas trop, on ne sait pas trop ce qui se passe autour de nous, on regarde peut-être plus que ce qu'on fait nous-mêmes, et on se perd un petit peu.
Donc mon message, c'est ça, c'est photographier.
Parce qu'en vrai, ce que je photographie, c'est pas des choses extraordinaires.
Je le redis, mais c'est pas des choses extraordinaires.
Ce sont des choses classiques de la vie.
Et parfois, ça m'étonne un peu que les gens me disent « Ouais, c'est trop bien, etc.
» Ça m'étonne parce que parfois, je trouve pas que je fais des trucs ouf, quoi.
Mais on est tellement envahi par plein de choses que les choses simples deviennent des choses extraordinaires.
Et puis on est tellement resserré sur son petit groupe à soi, son petit nombril à soi, qu'on oublie un peu de regarder aussi et de discuter avec les autres.
Donc, vivre ensemble, c'est le maître mot, en fait.
C'est vivre ensemble, parler ensemble.
C'est pour ça, en fait, dans ma photographie, il y a de tout, en fait.
Il y a de tout.
Moi, je parle du principe, moi je suis fils d'immigré, pour le coup.
Et je parle du principe qu'on peut vivre tous ensemble.
Je l'ai vécu pendant des années avec n'importe quelle origine, n'importe quelle religion.
Et je comprends pas encore ce débat-là.
Et je pense que ma photographie est là pour montrer ça, en fait. – Je pense que ce débat, il est là, justement, parce que les gens, ils se referment sur leur petit groupe à eux.
Et que du coup, ça exacerbe tout.
Et du coup, tu n'as pas le droit de regarder.
Si tu n'es pas juif, tu n'as pas le droit d'aller photographier les juifs.
Si tu n'es pas noir, tu n'as pas le droit d'aller photographier les noirs.
Si tu n'es pas rebeu, tu n'as pas le droit d'aller photographier les rebeus.
Et c'est, en fait, à un moment, ce qui est sympa aussi, c'est d'avoir les regards croisés d'un juif qui va photographier un noir, un arabe qui va photographier un juif.
Et de regarder, en fait, comment les autres y nous voient aussi. – Bien sûr.
Pour le coup, là, c'est une...
Il y avait un livre que je voulais absolument avoir.
Il s'appelle « Haiti » de Bruce Gilden. – Ouais. – Je n'arrivais pas à l'avoir.
Bon, bref, il y a un ami photographe que je connais sur Instagram qui me dit « Écoute, je suis dans une librairie et le livre, il est là.
» Je dis « OK, d'accord.
» – Achète. – Donc, je suis parti le voir.
Et donc, je l'ai acheté.
Je connais Bruce Gilden.
Je trouve qu'il est très, très agressif dans sa photographie.
Je ne suis pas un photographe que j'apprécie plus que ça, mais je me dis « Bon...
» – Le goulot extraordinaire, je n'aime pas trop la personne, moi. – Oui, voilà.
Et donc, je le prends parce que je me suis dit « Ça a Haiti, il faut que je regarde, il n'y a pas trop de livres sur le pays.
» Je le prends et tout.
Je le lis, je regarde.
Je me dis « Ah, il est cool, le livre, quand même.
Il est cool.
» Mais moi, je ne suis pas un haïtien.
Je suis français.
Je suis venu ici il y a deux ans.
Je suis français.
Donc, je lui montre à mon père et à mon grand-frère.
Et je vois que mon père et mon grand-frère font ses sourcils.
« Mais pourquoi ?
» « Ce n'est pas Haïti.
Ce n'est pas ce que ça représente.
» Et là, j'ai vu que, en fait, Bruce Jilden, il a montré une partie d'Haïti, en tout cas, sa vision d'Haïti.
Ce n'est pas la vision de mon père qui a vécu des années là-bas.
Ce n'est pas la vision de mon frère qui a vécu des années là-bas, en fait.
Et donc, le livre, il est important.
Mais si je le montre à mon père, il va le jeter.
Ce qui est fou, ce que tu es en train de me dire là, il n'y a pas longtemps, on m'a contacté pour une bar mitzvah, encore une fois.
Les stéréotypes.
Moi, je suis juif, j'ai le droit de faire les bar mitzvahs.
En fait, la cliente, je n'étais pas dispo, je lui dis « Ecoutez, si vous voulez, je peux vous envoyer un collègue.
» Elle me dit « Est-ce qu'il connaît ?
» Je lui dis « Mais ce ne serait peut-être pas plus mal qu'il ne connaisse pas plus que ça.
» C'est-à-dire, il y a ce que tu dois savoir.
C'est évident, quand tu vas dans un mariage juif, le « oui », ce n'est pas un « oui », c'est la femme qui ferme le doigt sur l'anneau, ça veut dire « oui ».
Effectivement, c'est important de savoir ça, pour prendre la photo de ce moment-là, parce que si tu n'es pas conscient de ce que c'est, tu passes à côté.
Mais après, des fois, ça fait du bien aussi d'avoir quelqu'un qui a un regard totalement neuf.
Parce que moi, je connais tout, je vais me positionner de telle manière pour le verre cassé, je vais me positionner, les trucs et tout.
Quelqu'un qui ne sait pas tout ça, finalement, pour peine qu'il se documente un peu quand même, peut-être il aura un autre regard.
Peut-être qu'effectivement, tu peux comprendre que ce regard ne te plaira pas forcément, parce qu'il sera peut-être plus critique, ou il sera peut-être moins naïf, ou il sera peut-être moins dans l'adoration du truc, tu vois.
Mais un autre regard, quoi.
Oui, bien sûr.
C'est pour ça que je dis que le livre, il est important.
En tout cas, pour moi, il est important.
Et puis, je me suis dit, quand j'ai vu ma famille avoir cette réaction-là, je me suis dit « Tiens, il faut peut-être que toi aussi, t'y ailles, et que tu photographies là-bas, avec ton regard à toi, et faire ressortir quelque chose.
» Donc, c'est un projet aussi.
C'est chaud quand même, parce que là, ton père va juger ton boulot.
Ouais, mais est-ce qu'ils sont...
Ouais, mais...
Ouais, c'est vrai que mon père va juger mon boulot.
Après, mes parents, ils ont toujours été...
Étonnamment, mon père.
Ma mère a toujours été derrière moi, sur tout ce que j'ai fait.
Mon père aussi, bien sûr.
Mais mon père a toujours en plus rentré, tu sais...
Voilà, tu vois.
Il est toujours en retrait, un peu.
Et mine de rien, c'était son anniversaire, il y a deux jours, et je lui ai dit « Papa, je vais te prendre en portrait, parce que je ne l'ai pas encore pris en portrait, et tout.
» Il m'a dit « Ok, pas de souci.
» Donc, voilà.
C'est cool.
Une belle photo qui arrive bientôt.
Je pense, ouais.
Ça va être cool.
On arrive à la conclusion de l'épisode.
Première question de la conclusion.
C'est le pire moment de ta carrière de photographe ou d'artiste.
Le pire moment de ma carrière photographe et d'artiste...
Hum...
Est-ce que j'ai un pire moment, même ?
Hum...
Le pire moment, on va le dire, c'est...
C'est à l'époque, j'étais au Ricoh GR.
Et il n'y avait pas beaucoup de personnes qui l'utilisaient, le Ricoh, à l'époque.
Je ne sais pas si aujourd'hui ils l'utilisent, c'était au Numérique.
Et donc, la marque m'avait contacté.
Ils savaient ce que je faisais.
Ils me disaient « On aime bien ce que tu fais, etc.
Entre immunaires, et tout.
» Je dis « Ok, pas de souci.
Sans problème.
» Ils m'ont dit « Ouais, tu fais une vidéo, un genre de vlog.
» J'avais déjà fait un vlog auparavant, ils avaient bien aimé.
Et donc, je l'ai fait.
Et en fait, à la fin, on me dit « Non, en fait, on voit trop les visages, etc. etc.
» Mais en fait, c'est le travail que j'ai toujours fait.
Et donc, ils ont essayé de... de me dire de faire autrement.
Et moi, je lâchais l'affaire.
Je dis « Non, c'est bon.
» Je ne veux pas dire que c'est le pire moment de ma carrière, mais j'ai toujours une méfiance quand il y a des organismes qui viennent me... m'approcher, parce que j'ai tellement peur qu'on me bride.
Ils ont quelque chose à vendre, donc forcément, quand il y a de l'argent, il y a du contrôle.
Il n'est pas toujours pour toi.
Voilà, c'est ça.
Donc, ouais, j'ai eu du mal.
Je ne dirais pas que c'est le pire moment, mais c'est un des moments pas très agréable.
Ils sont magiques, quand même, des fois.
J'ai fait une formation avec un photographe qui s'appelle Théo Jaffre, qui est plus connu sous le nom de Théo Lavabaud.
En ce moment, parce qu'il fait de la chanson, en fait, il racontait un shooting qu'il avait à faire avec une marque.
Et il se trouve que ce jour-là, c'est un type qui fait vraiment des trucs très, très...
Il part très loin dans le délire.
Et donc, un jour, il fait ça, et manifestement, il n'était pas ultra inspiré.
Donc, le client, il dit, non, c'est pas du Théo, c'est pas ce que j'ai demandé.
Donc, il dit, OK, tu veux du Théo, je vais te faire du Théo.
Donc, il fait 1000% ce qu'il fait à côté, et le client, il dit, ben, c'est trop.
Non, mais attends.
C'est pas assez, c'est trop, en fait, tu veux ça, ben, c'est ça que je te donne.
Et ça m'a marqué, ça, parce que ce côté où, des fois, tu...
En fait, quand tu crois qu'on attend quelque chose de spécifique de toi, moi, je trouve ça paralysant, en fait.
Oui, bien sûr.
C'est pour ça que j'aime pas travailler pour quelqu'un, en fait.
J'aime pas travailler pour personne.
Je trouve que, comme j'ai dit au début de l'interview, c'est une interview, j'ai pas de casse, on va dire plus, parce que c'est une discussion.
Et, en fait, je veux que la photographie soit un échappatoire, c'est tout, en fait.
Et dès que ça a commencé à venir me parler, à me dire des trucs, j'avais la tête grosse comme ça, je me dis, non, c'est bon, la pression de la photo, c'est pas possible, en fait.
Et donc, depuis ce jour-là, on m'a déjà approché, mais ça m'intéresse pas.
C'est quoi le meilleur moment de ta carrière ?
Le meilleur moment de ma carrière ?
La photographie, toujours.
Je pense que c'est quand j'ai obtenu mon LEICA, je crois.
Je suis pas très matériel, mais quand je l'ai eu, je l'ai eu avec sacrifice.
Donc forcément, quand je l'ai eu avec sacrifice, forcément, t'es doublement content de l'avoir.
C'est pour ça que je l'utilise sans arrêt, tout le temps, tout le temps.
Et je pense que c'est le meilleur moment de ma carrière, parce qu'avec ce décalage, j'ai réussi à faire ce livre-là, je suis là devant toi, je rencontre des gens.
Un bon appareil, ça te donne envie de sortir faire des photos ?
J'en avais un, j'avais mon Ricoh avant.
Mais c'est vrai que quand j'avais le Ricoh, je faisais les mêmes photos, parce que j'étais à peu près pareil, quand tu regardes bien les photos du Japon, c'est au Ricoh, c'est à l'Atlantique.
J'ai à peu près le même process, parce que c'est du 28mm, même mon traitement sur Lightroom, j'essayais de me calquer un peu sur le contraste de l'Atrix, parce que moi je suis un grand fan de l'Atrix 400.
Mais quand j'avais le Ricoh, les gens ne me voyaient pas comme un photographe, parce qu'en fait, c'est un petit appareil tout petit.
Et quand je dis que je suis photographe, ils me prenaient pas vraiment au sérieux.
Quand j'ai eu le Dk, le premier jour, je marchais dans un tour, « Ah, monsieur, vous êtes photographe, blablabla », c'était la même chose, en fait.
Et ça qui est marrant, c'est que l'appareil montre aussi l'importance du photographe, étonnamment, même si je trouve ça un peu bizarre, mais en tout cas c'est une réalité.
Maintenant, c'est les petits appareils qui font de la photographie.
À une époque, c'était des machins énormes, quand je suis passé au Fuji, ils sont juste à côté, avec des petites optiques, des trucs vraiment tout petits, je me dis « qu'est-ce qu'ils vont dire les gens ?
» et en fait, j'avais l'impression que mes appareils Fuji étaient plus chers que les Canon.
Je me suis dit « bon, écoute, ok, vas-y, je crois à ça, c'est pas un problème ».
On arrive à la toute dernière question.
« Qui me recommanderais-tu pour un prochain épisode ?
» Hum...
Euh...
J'en ai deux, on va dire.
J'ai un ami, puis j'ai deux amis.
J'ai un ami, c'est Ousmane.
Ousmane, j'ai déjà repéré.
Donc, Ousmane Djabi, lui, il est...
J'aime bien son travail.
Alexandre Martin.
Alexandre Martin, connu sous le nom de « âme photographique de rue ». « âme photo de rue ».
Donc c'est les deux.
Il y en a un qui fait du... de la photo de rue en noir et blanc, similaire au mien.
Et l'autre aussi, mais il est plus sur le moyen format.
Je note les noms, je vais aller voir ça d'un petit peu plus près.
Ousmane, comme je te suis, et que je vois que vous êtes souvent ensemble, du coup j'ai regardé son travail, je le suis également.
Et après, c'est juste une question d'équilibrer mes épisodes aussi, pas avoir deux profils qui se ressemblent trop proches.
Mais bon, en tout cas, il est déjà dans ma liste et ce sera une discussion qui arrivera un jour.
Et puis on va voir pour tout le reste.
Où est-ce qu'on peut te retrouver sur Internet, les gens qui voudraient te suivre ?
Je m'attends à ce que tu me déclares dans l'épisode.
Moi, c'est le petit gars noir sur Instagram.
Je n'ai pas de site Internet.
J'ai juste le petit gars noir sur Instagram, c'est tout.
D'accord.
L'adresse où te retrouver, je mettrai le lien dans les notes d'épisode.
Il me reste à te remercier d'avoir participé à cet épisode.
C'était fascinant.
Après, c'est des profils de street photographie.
Je suis toujours hyper enthousiaste sur les profils comme le tien.
Maintenant, tout ce qu'il nous reste à faire, c'est d'aller faire une sortie photo ensemble.
Ou 10.
Et puis c'est parti.
Merci beaucoup.
Merci.
Merci d'avoir écouté cet épisode.
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Vous pouvez également aller sur le blog Dans l'œil du photographe à l'adresse www.dlodp.fr.
C'est tout pour aujourd'hui.
On se retrouve au prochain épisode dans l'œil d'un nouveau photographe.
Dans l'œil du photographe, merci, c'est fini.
Au caca.
Dans l'œil du photographe, merci, c'est fini.
Au caca.
C'est fini.
A plus !