113 - La perfection, finalement, est-ce que c’est un bon choix? - Angélique Boissière

 
 

Je pourrais choisir la facilité et vous dire que mon invitée fait des photos de nu féminin. Je pourrais, et vous savez que j’aime bien forcer le trait des clichés pour en ressortir aussi vite qu’on y est entrés. Mais quand on regarde de plus près, et on va le faire tout au long de cet épisode, on réalise vite que le travail d’Angélique est infiniment plus profond qu’une telle description ne le laisserait paraitre. Avant de photographier le corps, elle photographie l’esprit et le visage, qui relèguent tout le reste au second plan. Avant de parler de technique, elle parle de connexion et de rapport à l’autre, et de l’intimité qui peut se créer le temps d’un portrait entre photographe et modèle.

Elle fait consciemment des choix qui ont un yin et un yang: l’argentique pour les contraintes qu’il lui impose, un corps nu pour mieux mettre en valeur un visage, créer pour soi mais partager pour que la création garde un sens, photographier les autres pour se photographier soi. Ne pas chercher LA photo mais savoir à quel moment on la tient.

Bienvenue dans l'oeil d’Angélique Boissière.


A propos de l’invitée:

Site Web

 
 
 
 

Legos de l’épisode:

  • Alors déjà pourquoi Steve Jobs?

  • (sur le reportage en argentique - NDR) C’est pas si balèze, parce que comment faisaient nos aïeuls?

  • Ca influe sur ta manière de travailler (L’argentique - NDR), ça c’est certain. Tu fais plus des gros volumes, tu fais plus de la rafale, mais tu essaies de shooter le bon moment. Et donc tu en loupes forcément, mais c’est un parti pris.

  • Je dirais pas que c’est de la photo de nu mais plus de portrait.

  • Pour moi ce qui compte le plus c’est le visage, je dirais que le nu sert le portrait. C’est pas forcément le sujet.

  • On ne doit pas forcément puiser son inspiration dans le domaine qu’on exerce. C’est pas parce qu’on est photographe qu’il faut forcément s’inspirer de photos. Pour moi l’inspiration elle vient de tout, et le roman invite à l’imagination, au rêve, au fantasme, et personnellement ça me plonge dans un mood créatif.

  • J’ai des breaks, mais ça fait fondamentalement partie de moi d’être créative, depuis toujours.

  • Dans le domaine du portrait, il faut être touché par le visage, par l’expression, que ça provoque quelque chose d’universel aux gens qui la regardent.

  • Pour moi c’est un jeu d’enfant de développer, c’est vraiment pas compliqué, mais c’est très chiant, c’est très long, je déteste ça.

  • C’est un truc que je déteste dans la photo numérique, c’est de devoir trier. Donc il y a aussi du bon et du moins bon.

  • Le choix de l’argentique, c’est aussi ça: c’est se limiter, se restreindre, parce que je suis quelqu’un qui part dans tous les sens, et donc j’ai besoin de limites et j’ai besoin de contraintes.

  • Quand je fais des photo, j’ai pas en tête “il faut que je fasse LA photo”, c’est “il faut que je fasse DES photos”, et après c’est vrai qu’il y en a toujours une qui va se démarquer du lot, et des sous-photos importantes qui ont finalement leur importance puisque ça rythme mon travail.

  • Tout grand photographe que j’admire, je vois bien que par séance il y en a une, et on voit quand même toujours plusieurs autres photos de la séance qui sont aussi superbes, mais il y a cette photo qui prime. Donc c’est aussi intéressant d’en sortir plus qu’une.

  • La perfection, finalement, est-ce que c’est un bon choix? Est-ce qu’on ressent des bonnes choses avec la perfection? Je suis pas sure.

  • Je préfère être dans l’instant du shoot plutôt que de regarder mon appareil si la photo est bonne.

  • Souvent je sais quelle va être la photo de la séance, je le sais. Je vais faire mes 48 photos, mais je sais qu’il y a ce moment, là, potentiellement ça va être la photo.

  • Plutôt que de casser ce rythme et cette ambiance avec mon modèle à toujours sortir mon posemètre… je préfère faire à l’oeil dans la vitesse, quitte à me tromper, plutôt que de casser une osmose de création.

  • Je ne réfléchis pas à mes photos: je fais de la photo de manière émotionnelle, irrationnelle, illogique.

  • Moi je fais de la narration à partir du réel. Je suis pas du genre à rajouter des éléments qui n’ont rien à faire là. Ce qui m’inspire c’est la réalité, et de donner une sorte de poésie à cette réalité.

  • C’est vrai que c’est particulier de se photographier, c’est particulier de se montrer au monde comme ça…

  • Il faut donner quelque chose à l’autoportrait, il faut se révéler, il faut montrer une part de soi malgré tout. Il faut pas être pudique, sinon ça ne peut pas fonctionner.

  • Dans la société on est pas totalement 100% nous mêmes, on a nos masques.

  • Je pense que l’art se partage, la création se partage, sinon elle n’a pas trop de sens.

  • Aujourd’hui je crée pour moi, et je ne veux plus créer pour Instagram en fait. Parce qu’il y a la vie Internet, et il y a la vraie vie, et ce qui marche sur Internet ne marchera pas forcément dans la vraie vie.

  • J”ai juste essayé de raconter mon histoire avec pudeur malgré tout, parce que je raconte pas grand chose. Je raconte juste mes émotions, mes sentiments, je sais très exactement quelle photo a été prise à quel moment, et en ça, c’est devenu un journal intime de mes émotions.

  • Tout vient toujours d’une émotion dans mes autoportraits, et donc la question de la légitimité ne se pose pas.

  • La technique est au service de l’image, mais la technique ne doit pas être seule pour composer une image, sinon ça fonctionne pas.

  • L’absence de technique peut créer des choses super intéressantes, et une surprise, et une émotion qui aurait pas été là sans accident technique… l’accident est une bonne chose, parfois.

  • Qu’on soit femme ou homme, on a tous une part masculin ou féminin en nous.

  • La nudité sert au visage, à l’expression du visage, met en valeur le monde qui peut se créer autour d’un visage, plus que la nudité en tant que tel.

  • Je pense que quand on prend quelqu’un en photo, qu’on soit hétérosexuel, homosexuel, femme, homme, on éprouve une sorte d’amour quand même, pour nos modèles.

  • Le but est de mettre en valeur le corps et mon modèle, mais de ne pas susciter le désir chez celui qui la regarde, et je pense qu’elle est là la différence, c’est l’intention du photographe.

  • La beauté est peut-être dans l’oeil de celui qui photographie. Moi je cherche des identités fortes en photo, des modèles qui dégagent quelque chose de particulier, en tout cas moi qui me touche, et c’est très subjectif…

  • J’aime bien l’idée de faire ressortir un monde intérieur par un portrait. L’intensité d’un regard peut révéler beaucoup sur la personne.

  • Les modèles que je shoote, c’est une part de moi, une projection de moi.

  • Les conditions météorologiques de froid, de vent, d’inconfort, créent autre chose que le confort. Et le confort, c’est l’ennemi de la créativité.

  • J’adore découvrir la vie des gens, et je trouve que c’est tout un monde de découvrir une nouvelle personne.

  • Je veux pas parler à leur place parce que c’est pas mon combat, mais par contre je peux les montrer.

  • La photo est un prétexte à la rencontre… Sans la photo, je n’aurais jamais rencontré tous ces gens.

  • Il n’y a pas de pire moment, il y a des moments de doute qui sont les pires.

Dans cet épisode, on parle de:

  • Livre offert: La promesse de l’aube - Romain Gary

  • Paolo Roversi

  • Helmut Newton

  • Ellen von Unwerth

  • Diane Arbus

  • Série: Madame Arthur

  • Recommandation d’invité: Fabrice Mabillau - Gilles Berquet - Ambre Renard


A propos du Podcast:

Hôte: Julien Pasternak - Instagram - LinkedIn - Clubhouse

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Générique d'intro: Joakim Karud (https://soundcloud.com/joakimkarud) 

Générique de fin: Dyalla Swain (http://soundcloud.com/dyallas)

 
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