124 - Avant, je faisais des photos des gens, maintenant je fais des photos avec les gens - Jean-Baptiste Pellerin

 
 

C’est quoi un vrai artiste? Est-ce que c’est quelqu’un qui décide qu’il produit de l’art quand bien même il ne ferait pas grand chose d’original, ou quelqu'un qui persiste sans cesse dans la voie un peu dingue qu’il a choisie, même quand c’est difficile et qu’il est le seul à y croire?

Comme moi, vous avez probablement déjà vu le travail de Jean-Baptiste dans la ville, sans savoir qui se cachait derrière ces portraits sous verre collés sur les murs. Comme moi, vous les avez certainement intégrés dans vos photos. Et aujourd’hui, comme moi, vous allez découvrir qui se cache derrière ce travail, et pourquoi il fait tout ça. A son évolution photographique où les différentes phases de sa vie se répondent en boucle, répond son évolution personnelle à travers l’évolution de son regard sur les autres. Mais aujourd’hui, pour une fois, c’est son portrait à lui qu’on va faire.

Bienvenue dans l’oeil de Jean-Baptiste Pellerin.


A propos de l’invité:

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Legos de l’épisode:

  • J’ai vu des travaux de street-artists a l’ancienne des années 80, Mystic, Nemo ou autre, sans jamais franchement connaître leurs noms ou savoir qui ils étaient, mais a chaque fois que je voyais ce qu’ils faisaient ça me touchait.

  • Je suis portraitiste de rue, c’est à dire que j’arrête les gens dans la rue pour leur demander si je peux faire une photo d’eux, et une fois que la photo est faite, si elle est bonne, je la tire, je la fabrique a l’intérieur d’une plaque entre de la céramique et du verre, et je vais la coller la nuit dans les rues de Paris et autres endroit ou je vais, d’autres pays, d’autres villes.

  • J’ai toujours fait de la photo.

  • Qu’on photographie des canapés, des gateaux, des fleurs, n’importe quoi, une photo c’est une composition, c’est des forces, c’est des lignes, c’est de la couleur, c’est de la lumière surtout. Qu’on le fasse avec un SDF dans son sac de couchage dans la rue, ou un bouquet de fleur, d’un point de vue composition, d’un point de vue image, c’est la même chose, il n’y a que le sujet qui change.

  • Quand j’ai commencé a devenir professionnel, j’ai toujours considéré que j’avais un atout supplémentaire par rapport aux autres, qui était que je venais de la rue, c’est a dire que je venais de la photo perso, et que j’avais fait des années de photo perso avant de me lancer comme professionnel, et je l ‘ai toujours considéré comme un atout. Mais je savais pas a l’époque que j’allais aussi considérer comme un atout quand je retournerais dans la photo perso et dans la rue en l’occurrence, de toutes ces années passées en photo pro.

  • Je savais que la couleur existait mais je ne m’étais jamais préoccupé de la couleur jusqu’à ce que je lise ce livre, et depuis la couleur est devenue pour moi une sorte d’obsession. Et en tout cas vraiment une passion.

  • Etre créatif… ça doit être quelque chose comme se lancer dans un projet, y penser tout le temps, s’endormir en y pensant, se réveiller en y pensant, préféré travailler dessus plutôt que d’aller voir un coup avec les copains.

  • Je m’intéresse à d'autres choses, mais ça ramène toujours à la photo.

  • Faire une photo, c’est réussir, dans un certain nombre de déclenchements, à obtenir une bonne photo.

  • On est nombreux à faire beaucoup de photos pas mal, mais une photo pas mal ça vaut rien.

  • Une photo parfaite n’existera pas, et surtout si elle est parfaite elle sera parfaitement chiante.

  • Quelle drôle d’idée d’aller voler quelque chose qui est donné gratuitement à voir à tout le monde? Je comprends pas la démarche… Pour moi c’est la différence entre considérer que quelque chose est à personne et que quelque chose est à tout le monde.

  • Quand je reviens d’Inde ou d’Afrique, en général je ne peux pas faire de photo pendant une dizaine de jours tellement je trouve que tout est gris.

  • Moi j’ai fait de la photo volée de mes 15 ans jusqu’à mes 45 ans…Mais le jour où j’ai changé ma façon de faire des photos et que j’ai commencé à faire des photos des gens avec les gens, je me suis rendu compte qu’en fait j’étais pas vraiment à ma place pendant toutes ces années.

  • Faire de la photo volée c’est se rendre invisible, c’est être témoin sans jamais interagir, c’est la discrétion. Moi au bout de quelques décennies, j’ai éprouvé de la frustration à regarder des gens rire, faire des choses ensemble, voir toute cette vie, et moi me cacher.

  • D’être demandeur en général, ce n’est pas une position très facile.

  • J’ai toujours su que j’étais quelqu’un de plutôt souriant, et j’ai compris que le sourire était sans doute un de mes grands atouts pour ce genre de travail. L’autre atout que j’ai mais qui est lié à mon sourire, c’est que j’ai la chance d’avoir une bonne gueule.

  • Le fait de ne juger personne, ça je l’ai travaillé, parce que je suis aussi con que tout le monde, je juge les gens comme tout le monde, j’ai des à priori comme tout le monde. Sauf que, pour faire des photos des gens je me suis rendu compte qu’il fallait que j’aie l’air de les aimer, et pour réellement avoir l’air de les aimer, je me suis rendu compte qu’il fallait que je les aime, et surtout que je les juge pas, et donc petit à petit, je suis rentré dans un rôle, comme un comédien, qui est le rôle de quelqu’un qui ne jugeait pas.

  • Je n’ai pas le choix que de les aimer, et très franchement je les aime à ce moment là, j’enlève tous les à priori.

  • A partir du moment où la personne accepte de poser pour moi, pour moi c’est énorme, c’est vraiment un beau cadeau… Je suis vraiment très reconnaissant de ce geste et donc si je les recroise, je vais peut-être pas leur tomber dans les bras à chaque fois, mais de temps en temps oui.

  • Je suis quelqu’un qui ne planifie pas tellement ma vie, par contre je ne renie pas tous les moments de ma vie… Tout ce qu’on fait nous sert et je trouve ça assez fascinant.

  • La photo en pied, il y a les habits, mais il y a aussi une certaine prestance: on pose en entier tel qu’on est, et il y a vraiment quelque chose dans la pose qui est particulier.

  • J’ai commencé à faire ces photos sans me poser aucune question, et c’est petit à petit, c’est en les postant sur les réseaux sociaux, en ayant aussi les retours des gens qui aimaient ce que je faisais, et qui m’expliquaient pourquoi ils aimaient, que ça m’a orienté, et que j’ai dit “tiens, ça peut devenir un vrai travail”.

  • Le décor est pour moi aussi important que le sujet.

  • Si je croise quelqu’un qui me plait et que la lumière est pas terrible et que je trouve aucun fond, je vais la laisser partir un peu comme un pêcheur qui laisserait partir un poisson trop petit.

  • J’aime bien photographier des gens au milieu de la rue, c’est une façon d’isoler la personne plus facilement parce que c’est au milieu de la rue que tu vas avoir la perspective la plus lointaine et qui va te permettre de partir le plus flou possible.

  • Avant, je faisais des photos des gens, maintenant je fais des photos avec les gens. C’est vrai que c'est une grosse différence, la personne va m’apporter tout ce que moi je ne maitrise pas: Moi je m’occupe de la lumière, du décor, de la composition, le reste c’est eux.

  • J”aime bien l’idée de documenter une époque, maintenant est-ce qu’on a besoin de documenter une époque comme on le faisait dans les années 40-50, avec tous les milliers d’images qui circulent aujourd’hui.

  • Je pense que nous les photographes, beaucoup d’entre nous ce qu’on aime c’est de faire des photos, et il n’y a rien de plus triste qu’un photographe qui ne fait pas de photos.

  • Aujourd’hui, tous les gens que je côtoie sont des gens que j’ai directement ou indirectement croisé dans la rue, donc évidemment ça dépasse la simple photo, ça devient une façon de vivre, ça devient autre chose.

  • Moi j’oublie les mauvais moments à vrai dire.

    Dans cet épisode, on parle de:


A propos du Podcast:

Hôte: Julien Pasternak - Instagram - LinkedIn - Clubhouse

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Générique d'intro: Joakim Karud (https://soundcloud.com/joakimkarud) 

Générique de fin: Dyalla Swain (http://soundcloud.com/dyallas)

 
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